Le Président de la République recevait les députés UMP à l’Elysée mercredi dernier. Le chef d’orchestre voulait recréer l’harmonie après une série de couacs, d’improvisations dissonantes et le bide des municipales. L’applaudimètre a salué l’artiste, malgré quelques oreilles blessées. Mais le malaise est-il dissipé ?
Malaise : c’est le sentiment avoué par ma voisine avant de succomber au charme. Le ton du début était, il faut le dire, surprenant. Le Président avait commencé Musette sur l’air du « Non ! Je ne regrette rien » à l’accent gouailleur et complice. Certains, mal intentionnés, ont entendu « j’ai toujours raison ». La suite fut une interprétation du thème : « lorsque je m’ausculte, je m’inquiète. Lorsque je me compare, je me rassure », thème et variations sur de Gaulle et ses échecs électoraux, Mitterrand et ses alcôves de la République, Chirac, son ambition au long cours et son immobilisme. Certes. Encore faut-il que le triomphe incontestable de 2007 ne soit pas qu’un feu…d’artifice, et qu’il y ait des résultats propres à permettre une réélection, que les trois cités ont obtenue, mais pas toujours en raison des résultats.
Mon inquiétude à ce sujet est double. D’abord, parce que l’électorat populaire perdu entre 2007 et 2008 ne reviendra pas nécessairement. Ensuite, parce que la méthode de Nicolas SARKOZY se résume à ne pas être une cible immobile. C’est cette tactique de mouvement perpétuel qui lui dicte d’employer systématiquement le mot « conservateur » dans un sens péjoratif.
Comme il l’a rappelé dans un roulement de timbales à la Lully, on voulait qu’il aille au centre, il a, au contraire, parlé de l’immigration et de l’identité nationale. Erreur dans laquelle il a persévéré au second tour avec le succès que l’on sait ! Le stratège du mouvement avait cassé les lignes, démenti les analyses classiques, et conquis le peuple de droite, ceux qui, précisément, sont sensibles à la sauvegarde des valeurs fondamentales. Bref, il a rallié les conservateurs, les populistes ceux que méprisent les bobos qui votent Delanoë.
Mais si on ne gagne jamais sur un bilan, et toujours sur une rupture, on peut s’interroger sur la prochaine rupture. Il est désormais pour le vote des immigrés que « sa » majorité actuelle ne souhaite pas. Un mot de regret sur l’amendement ADN de son fidèle ami Mariani m’a surpris. Son insistance à soutenir et promouvoir la loi Taubira va aussi dans cette direction qui ne peut que décevoir beaucoup ceux qui l’ont élu et que ne satisfait pas la présence de Nadine Morano à la Famille.
Avec les questions des députés, les violons furent de la partie, à part un léger grincement d’Hervé de Charrette sur la réforme des Institutions. Pour le reste, on s’est contenté des récriminations habituelles sur les lenteurs de l’administration.
Resté inutilement le droit levé, je ravalais la question que voici : « Monsieur le Président, je vous ai toujours soutenu pour votre dualité : conviction et habileté unies dans un souci permanent d’équilibre. La loi sur l’immigration assortie du rejet de la double peine demeure un modèle. En revanche, je ne perçois plus cette heureuse synthèse dans trois aspects de votre politique.
Où est l’habileté de l’ouverture ? Elle évite, selon vous, le passage de la gauche à la social-démocratie, mais elle lui a redonné du crédit, conforté le stupide ascendant idéologique dont elle bénéficie dans notre pays, alors que 2007 était avant tout, contrairement à 1995 et à 2002, une défaite sur le terrain des idées.
La valeur-travail et le pouvoir d’achat ont joué un rôle déterminant dans votre victoire. Mais le pouvoir d’achat est resté bien seul après la débandade de la TVA sociale. Ce n’est pas anecdotique, car l’emploi comme cause de la richesse, c’est une politique de l’offre. La priorité donnée à un pouvoir d’achat, par nature toujours insatisfait, c’est une politique de la demande. C’est aussi différent que la droite et la gauche. Les mauvais sondages, comme les chiffres de notre commerce extérieur montrent qu’il n’est jamais très profitable d’affronter l’adversaire sur son terrain.
Enfin, la Présidence, comme toute autorité légitime repose sur un subtil dosage d’être et de faire, quelquefois aussi de paraître. Nous vous avons aimé pour votre savoir-faire, mais vos prédécesseurs avaient davantage soigné le savoir-être, et souvent le paraître. N’est-il pas temps de rétablir l’équilibre ? ». Je n’avais pas l’intention de le dire, mais il me semble que l’être est essentiel chez celui qui incarne la Nation. Pour le faire, voyez le Premier ministre.
Au-delà de ces questions, s’insinue une sensation : celle d’un divorce entre l’attente et le devenir. Celle-là était populaire et de droite. Le devenir, lui, dépasse les clivages, et réunit tous ceux qui s’enthousiasment d’une mondialisation dont ils ne subissent pas les effets, qui applaudissent à une Europe sans âme, dont ils n’ont pas besoin qu’elle les protège, qui rêvent de l’avènement de l’individu-roi, jouissant sans entrave morale, ni lien national, voire familial du grand marché cosmopolite à l’ombre des droits de l’Homme et de la Charte de l’Environnement.
Faut-il rappeler que dans cet univers pacifié, sans droite ni gauche, substituera une fracture entre celui qui fera son marché planétaire et celui qui fera ses courses le dimanche au hard discount du coin, pas sûr de conserver son emploi dans la production nationale.On voit renaître à travers elle un antagonisme plus profond que celui qui oppose les positions des socialistes aux libéraux. C’est celui qui oppose le conservatisme pour qui l’économie libérale n’est qu’un moyen au service de l’Homme et le libéralisme pour lequel le droit et le marché ont leur logique dont l’Homme est prisonnier.
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