Cette semaine a débuté l’examen du projet de loi constitutionnelle de Modernisation des Institutions. Après la discussion générale ce mercredi, l’examen des articles a commencé ce jeudi après-midi. La séance a été levée tard dans la nuit de jeudi à vendredi. J’ai déposé une vingtaine d’amendements sur ce texte : à l’article 3, 7, 9, 13, 14, 21, 28 et 31. Par ailleurs, je me suis inscrit sur les articles 12 (au sujet des “résolutions”), 24 (relatif aux “droits de l’opposition”) et enfin 31 (relatif au “Défenseur des droits du citoyen”).
Première satisfaction, vous le savez, mes amendements 215 et 216 visant à instaurer un référendum d’initiative populaire ont été adoptés.
Vous trouverez ci-dessous mes interventions sur les articles examinés cette semaine. Les débats reprendront lundi après-midi.
Avant l’article 1
- Au sujet d’un amendement de M. Brard (communiste) visant à instaurer “la démocratie participative” :
M. Christian Vanneste – Monsieur Brard, j’ai beaucoup moins apprécié votre dernière intervention que la précédente. Je trouve choquant qu’un parlementaire, symbole même de la démocratie représentative, la dénonce, expliquant même qu’elle serait en pleine décadence, ce qui est totalement faux puisque nous sommes précisément ici réunis pour donner plus de poids au Parlement. Il serait extrêmement dangereux que des comités Théodule de citoyens remplacent les voies de la démocratie représentative. À force de prétendre que la démocratie ne peut s’exercer au niveau de la nation tout entière – à laquelle vous semblez préférer le quartier –, vous risquez de produire, comme dans le monde d’Orwell, des citoyens « plus égaux que d’autres ». Et on le sait, les tenants de ces thèses sont précisément ceux qui veulent s’affranchir de la véritable démocratie, celle dont nous sommes les représentants.
Nous aurons l’occasion d’y revenir, le référendum d’initiative populaire constitue une bonne solution. S’il faut renforcer la démocratie directe, c’est au niveau national qu’il faut le faire (« Très bien ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP).
- Au sujet d’un amendement visant à affirmer dans la Constitution le caractère laic de la République :
M. Christian Vanneste – La vérité, c’est que cet amendement est redondant et qu’il entretient une confusion très courante. La laïcité, cela consiste à affirmer que la République respecte toutes les croyances et toutes les religions, pas à tenir un discours anti-religieux. Il faut aborder la diversité des croyances dans un esprit de tolérance…
M. Jean-Marie Le Guen – M. Vanneste qui donne des leçons de tolérance ! On aura tout entendu !
M. Christian Vanneste – Mais oui, et j’aurai l’occasion de le faire encore. Si nous sommes opposés à toute référence au mot « race », c’est parce que le concept de race ne repose sur aucune réalité. Mais la diversité religieuse existe, et la spiritualité, fût-elle laïque, mérite d’être respectée. Ne ressuscitez pas le petit père Combes !
M. Marc Le Fur – Très bien !
- Amendement visant à instaurer la proportionnelle
M. Christian Vanneste – Il est vrai qu’il y a eu des mouvements totalitaires dans des pays qui ont adopté la proportionnelle, mais il est également vrai que les plus vieilles démocraties du monde ont recours au scrutin uninominal à un tour, qui traduit une conception personnaliste du mandat : les représentants du peuple ne sont pas de simples pions instrumentalisés par des apparatchiks, mais des personnes de chair et de sang, qui se présentent devant les électeurs et qui les représentent en toute responsabilité. C’est un système infiniment plus sain.
Dans la région Nord-Pas-de-Calais, où je suis élu, la présidence a au contraire été exercée par un membre d’un parti, les Verts, qui ne comptait pas plus de cinq représentants. Il nous avait été suggéré de soutenir la candidature d’un représentant des « chasseurs et pêcheurs » afin de remporter la présidence, mais cette victoire eût été profondément immorale et antidémocratique.
M. Noël Mamère – M. Vanneste devrait relire ses auteurs, car il confond le personnalisme et la personnalisation du pouvoir, qui n’ont rien à voir (Mouvements divers). Quant à prétendre que le scrutin proportionnel conduirait à des régimes totalitaires, c’est une faribole. Du reste, je n’ai jamais demandé une proportionnelle intégrale. En Allemagne, la moitié des sièges sont attribués à la proportionnelle et l’autre moitié au scrutin majoritaire.
M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur – C’est inexact.
- Amendement visant à instaurer le droit de vote des étrangers
M. Christian Vanneste – Ne séparons pas à l’excès les scrutins locaux des scrutins nationaux. Qui vote aux élections municipales concourt au vote pour les élections sénatoriales.
M. Jean-Christophe Lagarde – Que faites-vous des cantonales ?
M. Christian Vanneste – Au fond, il y a deux gauches. L’une, sympathique, inspirée de Rousseau, prône une liberté qui repose sur la volonté qu’a l’individu de participer au contrat social.
M. Manuel Valls – 1793 !
M. Christian Vanneste – C’est ce que fait tout étranger qui, présent en France depuis plusieurs années, choisit d’en acquérir la nationalité. L’autre, antipathique, oppose au droit les faits : du seul fait que des individus qui vivent en France et participent à sa vie économique, il faut qu’ils deviennent citoyens, même s’ils n’en manifestent pas l’envie !
M. Patrick Braouezec – Au contraire : ils la manifestent tous les jours, et parfois davantage que les autres ! C’est incroyable !
M. Christian Vanneste – Pourquoi les soumettre à un tel déterminisme économique, qui n’est au fond rien d’autre que du marxisme ? (Rires sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)
M. Patrick Braouezec – Marx, lui, était un citoyen européen !
M. Christian Vanneste – Vous reniez ce qu’il y a de plus riche dans votre héritage : l’idée que l’homme peut choisir son destin, qu’il ne le subit pas !
M. Manuel Valls – Oui : c’est la République, Monsieur Vanneste !
M. Christian Vanneste – Cela vaut pour la citoyenneté. En rattachant le droit de vote à l’impôt et au travail, vous ressuscitez le suffrage censitaire, qui est parfaitement antidémocratique !
Notre système fait la synthèse entre la liberté des anciens, c’est-à-dire celle de participer à la collectivité en tant que citoyen, et celle que chacun a de jouir de droits fondamentaux et protégés, en tant qu’homme. L’homme et le citoyen vont de pair, mais nul ne peut être contraint à la citoyenneté !
M. Noël Mamère – Les propos de M. Vanneste sont extravagants. Vous ne cessez d’exiger des étrangers résidant en France qu’ils deviennent des citoyens en respectant les règles de la République au point d’apprendre le français, même pour ceux d’entre eux qui fuient la pauvreté ou la tyrannie et dont l’installation sur notre territoire s’apparente à un véritable parcours du combattant.
M. Christian Vanneste – Être citoyen, c’est participer !
Article 3 (nombre de ministres)
M. Christian Vanneste – Le comité Balladur, sans retenir l’idée d’un plafonnement du nombre de ministres, avait tout de même souligné que la moyenne s’établissait sous la Ve République à trente-cinq ministres, soit beaucoup plus que dans les autres pays comparables. Dix-sept gouvernements, dont quinze de droite, ont compté entre vingt et quarante ministres ; dix, dont sept de gauche, en ont compté plus de quarante. Un plus grand nombre de ministres n’a jamais été une garantie d’efficacité. Ainsi, le gouvernement de Mme Cresson en 1991 en comptait-il quarante-six, de même que celui de M. Mauroy en 1981. Les ruptures qui ont marqué la Ve République ont au contraire toujours été le fait de gouvernements resserrés et dynamiques – je pense par exemple aux gouvernements Debré, Pompidou, Balladur (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) qui comptaient tous moins de trente ministres. Ce souci de limiter le nombre de ministres, loin d’être superficiel, est au contraire tout à fait conforme à l’esprit de la Ve République.
L’inflation ministérielle sous les gouvernements de gauche est toujours allée de pair avec un alourdissement inutile de l’État, avec un État-sumo là où il aurait fallu un État-athlète. Le développement de l’État-providence s’accompagne toujours d’une augmentation du nombre des ministres alors que, devant les difficultés, il faut disposer, non d’un « casting », mais d’une équipe resserrée et soudée, gage d’efficacité.
En second lieu, l’exemple de la rigueur doit venir d’en haut. Nous ne pouvons pas demander à nos concitoyens de faire des efforts si nous ne sommes pas les premiers à donner l’exemple.
Ensuite, la multiplication des ministères crée une confusion des rôles, un chevauchement des compétences, qui ne facilitent ni le travail des parlementaires ni la lisibilité de l’action gouvernementale.
Enfin, puisque l’on souhaite un rééquilibrage entre le législatif et l’exécutif, il est logique d’augmenter le nombre de commissions parlementaires et de diminuer le nombre de ministères. Notre collègue de Courson propose une excellente règle d’or en matière de finances publiques. Je propose, pour ma part, une toise d’or pour le nombre de ministres.
Un commentaire
Très bonne idée que le référendum d’initiative populaire à l’échelle nationale. Mais je ne pense pas qu’il y ait une contradiction avec la démocratie participative de quartier. Ca dépend de quoi on veut débattre. Pour le projet “Lebas” à Lille, c’était très intéressant de suivre l’avancée des travaux dans l”atelier urbain de proximité et de débattre dans ce cadre du projet de rénovation… pour les habitants du quartier, pas pour ceux de Bordeaux ou Marseille.
Nota : Je n’ai rien compris à la nouvelle répartition des articles entre site et blog, toujours est-il que la colonne de droite du blog réactivé est désormais coupée au milieu sans que je change d’ordinateur !