Matinée passée à Marseille pour la visite du Centre de Rétention Administrative (CRA) du Canet dans le cadre de la Mission d’Information présidée par Thierry MARIANI.
Il faut noter que cette visite avait lieu le jour même de la présentation par Brice HORTEFEUX du Pacte européen sur l’immigration lors de la réunion du Conseil européen à Cannes.
Trois remarques :
Tout d’abord, on peut remarquer la très grande motivation des membres de la police nationale, aussi bien à l’aéroport de Marignane, avec la police de l’Air et des Frontières qu’au Centre de rétention, il s’agit de fonctionnaires compétents, intéressés par leur travail, visiblement soucieux des personnes dont ils ont la charge et également attentifs à innover aussi bien sur le plan des techniques que des méthodes.
En revanche, j’ai une fois de plus eu la désagréable impression de mettre un pied dans le royaume d’Ubu roi. J’avais lu le rapport issu de la visite de contrôle du CRA et des Zones d’attentes de Marseille par la Commission nationale, et j’avais été frappé par les deux aspects soulignés de manière positive dans le fonctionnement de cette administration : l’animation réalisée par une association externe afin de lutter contre le désœuvrement des personnes retenues, et la présence efficace d’un pôle judiciaire soutenu d’ailleurs par les magistrats du ressort, permettant à ceux-ci et aux avocats d’intervenir sur le lieu même de rétention, dans une salle fort bien aménagée et évitant ainsi le temps perdu et le coût exorbitant des transfèrements.
Malheureusement, la Cour de Cassation a annulé cette sage disposition, alors que dans le même temps elle acceptait la présence d’un pôle judiciaire sur le site de l’aéroport de Roissy, réalisé, mais qui ne fonctionne pas en raison de l’hostilité des magistrats et des avocats peu enclins à se déplacer.
De la même manière, la CIMADE qui est présente également dans les locaux du CRA afin de conseiller les personnes retenues a beaucoup de mal à faire la part de son rôle de conseil et de celui d’intervenant idéologique, hostile au principe même du contrôle de l’immigration et de la rétention. Il semblerait que l’association qui s’était impliquée dans l’animation ait été découragée par les tentatives de pression exercées sur elle pour donner un sens plus militant à ses interventions.
L’avis de la Commission nationale semble préférer la création d’un médiateur administratif au maintien de la présence ambiguë d’une association subventionnée en raison de son engagement aux côtés du service public, mais dont les motivations ne sont pas conformes aux orientations de celui-ci.
Il faut ajouter que les personnes retenues bénéficient également d’une assistance administrative et matérielle fournie par l’ANAEM, dont j’ai pu apprécier le degré de mobilisation.
Par ailleurs, une permanence de soin des hôpitaux de Marseille fournit une protection extrêmement efficace et très exigeante quant au respect des personnes.
Le taux d’occupation était particulièrement faible lors de notre visite puisqu’il n’y avait personne dans les deux zones d’attente de Marignane et de Marseille, soit 34 places vides et seulement 70 personnes retenues soit la moitié des places disponibles dans le centre de rétention. Il faut savoir que 130 policiers sont cependant mobilisés pour assurer la surveillance du centre à raison d’un policier par occupant virtuel.
En conclusion, on peut dresser un tableau globalement satisfaisant de la manière dont sont traités les immigrés en situation irrégulière et qui peuvent être retenus jusqu’à 32 jours dans notre pays avant qu’une décision d’expulsion ou d’élargissement ne soit prise. D’une part, c’est la durée la plus faible en Europe. Celle-ci est illimitée au Royaume-Uni. D’autre part, l’ensemble des services qui interviennent avec motivation et compétence est très complet: police, médecine, conseil juridique, aide sociale et matérielle. Tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes si tous ces services travaillaient dans le même esprit et avec le même objectif, le contrôle, humain et respectueux des droits de l’immigration. L’insistance de certains d’entre eux à prendre le plus de distance possible avec la police est un bien mauvais signe. Quant aux décisions de supprimer les deux activités les plus remarquables du CRA de Marseille, elles montrent à quel point le système administratif français a tendance à se prendre les pieds dans le tapis avec pour conséquence une majoration des coûts pour une minoration des résultats.
J’ai encore pu vérifier cela le soir-même lors d’un débat sur RFI (le débat du jour) avec un représentant de la CIMADE qui a critiqué avec l’excès habituel la directive européenne et le projet de Pacte. J’ai eu bien du mal à lui faire entendre que la politique d’immigration choisie que défend le Gouvernement français et qui a désormais le soutien du Conseil Européen est avant tout équilibrée et juste: elle privilégie l’accueil respectueux des étrangers fondé sur l’offre de travail, de logement et de soin, la lutte contre l’immigration illégale avec la fin des régularisations massives mais elle promeut aussi l’aide au développement et l’asile politique, notamment à l’égard des chrétiens irakiens en ce moment même. Accueillir moins mais accueillir mieux voilà qui résume cette politique qui allie réalisme et humanisme.
Un commentaire
Je retiens l’excellente formule à faire suivre dans les média;ACCEUILLIR MOINS MAIS ACCEUILLIR MIEUX