Le prénom charmant et proustien qui allait si bien à une grande actrice de mon enfance est devenu un objet d’opprobre à la suite du concours finalement assez habituel d’une maladresse de communication gouvernementale et de son utilisation par les collectifs libertaires de gauche.
Edvige ou l’ère du soupçon. Tel était le thème de la journée d’hier passée à la Commission des Lois au cours de laquelle ont été auditionnés plusieurs magistrats et responsables syndicaux, des avocats, le Président de la CNIL, les collectifs cités plus haut conduits par le Président de la LDH, et enfin le Directeur général de la Police nationale.
Deux soupçons parfaitement symétriques se sont opposés : chez les premiers, le soupçon du développement d’un Etat Big Brother prêt à ficher tous les français de plus en plus jeunes, en précisant des points de plus en plus intimes, et de l’autre le soupçon de la police sur la dangerosité des personnes susceptibles de commettre des violences.
Je souhaiterais pour ma part une position d’équilibre entre l’esprit sécuritaire et l’esprit libertaire que distinguait fort justement Bertrand de JOUVENEL (Du Pouvoir). C’est pourquoi il me paraît assez légitime, comme l’ont réclamé plusieurs collègues et comme l’a recommandé le Président de la CNIL, que de telles questions touchant aux libertés fondamentales soient traitées par la loi et non pas par un décret. Je partage également l’inquiétude sur la confusion des genres qui consiste à mettre dans un même fichier des personnalités, des individus potentiellement dangereux et des personnes souhaitant seulement accéder à la fonction publique. En revanche, la sûreté est comme le disait MONTESQUIEU la première liberté chez un citoyen, et elle est d’autant plus nécessaire que celui-ci est dénué des moyens nécessaires propres à lui assurer une défense autonome. La sécurité, c’est la liberté d’en bas, et il ne faut pas la négliger.
Petite remarque sur les informations à caractère sexuel. Elles peuvent être nécessaires au profilage qui est un instrument indispensable de prévention et d’élucidation pour la police. Elles ne visent pas seulement à déceler le plus tôt possible l’acteur des délits mais aussi à protéger une victime dont on aura mesuré le degré d’exposition. A cet égard, il est paradoxal de retenir le motif de l’orientation sexuelle de la victime comme circonstance aggravante, et de se refuser à l’intégrer aux éléments du profilage utiles à la police. Les groupes de pression ont parfois une sensibilité qui engendre des exigences contradictoires et irrationnelles.