M. Christian Vanneste interroge Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur la récupération des médicaments. Suite à l’adoption par le Parlement d’une loi interdisant la collecte, le tri et l’expédition de médicaments inutilisés à des fins humanitaires, et à l’absence de propositions de solutions de la part des pouvoirs publics afin de continuer à aider les populations concernées, c’est plus d’un million de personnes que l’Ordre de Malte-France, notamment, prenait en charge chaque année et qui vont être privées de soins. Ces personnes n’ont aucun autre moyen d’accès au médicament ; elles pourront donc, par exemple, mourir des suites d’une simple bronchite. Les associations se trouvent donc dans une situation très pénible. Il aimerait savoir ce que compte faire le Gouvernement afin de remédier à cette situation.
Réponse de Roselyne BACHELOT, Ministre de la Santé :
L’interdiction, à compter du 1er janvier 2009, de disposer des médicaments non utilisés (MNU), est nécessaire. Elle a été préconisée tant par un rapport de l’inspection des affaires sociales (IGAS) de janvier 2005 que par une recommandation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). En effet, outre les risques liés à la rupture de la chaîne pharmaceutique, les MNU exportés constituent un danger potentiel, principalement en raison de leur inadaptation fréquente aux besoins, du risque de détournement qu’ils présentent, et de l’obstacle qu’ils peuvent constituer à la mise en place des politiques nationales de santé. Le gouvernement est tout à fait conscient de l’impact important de cette décision d’interdiction sur l’organisation des associations humanitaires s’approvisionnant en MNU pour mener, en France comme dans les pays en développement (PED), l’aide médicale au profit des populations défavorisées qu’elles exercent habituellement. Il partage les préoccupations de ces associations quant à la poursuite de leurs actions. Afin de respecter l’engagement pris par le précédent ministre chargé de la santé, le Premier ministre a décidé de mesures comportant deux volets, l’un international et l’autre national. Ces mesures font suite aux travaux du groupe de travail mis en place en juin 2007 par la direction générale de la santé (DGS), en lien avec le ministère des affaires étrangères (MAE), la direction générale de l’action sociale (DGAS), l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), le LEEM (les Entreprises du médicament) et les représentants de la filière pharmaceutique (ordre des pharmaciens, grossistes et pharmaciens d’officine), afin d’accompagner les principales associations vers de nouvelles sources d’approvisionnement en médicaments, pérennes, rationalisées, mieux adaptées et sécurisées. Au plan international, il est nécessaire d’intégrer ce travail à la politique d’aide humanitaire internationale de la France, qui a énormément évolué ces dernières années. Dans ce cadre, le MAE va, dans les prochaines semaines, rencontrer les organisations non gouvernementales (ONG) concernées. Il les invitera notamment à lui présenter des demandes de subventions pour des projets bien identifiés, comportant une composante « dons de médicaments ». Les projets devront s’inscrire dans le cadre de la politique de coopération sanitaire du quai d’Orsay, qui soutient les efforts des PED dans la mise en place de politiques pharmaceutiques nationales, le renforcement de leurs capacités à mieux acheter par une aide, par exemple, à la procédure d’appels d’offres internationaux pour l’achat de médicaments, ainsi que dans le renforcement de la logistique liée à l’approvisionnement des structures de soins en médicaments essentiels. Concernant les besoins nationaux, le Premier ministre a acté le principe d’un financement de l’approvisionnement en médicaments des associations, qui les fournissent aux populations les plus démunies et trop désocialisées (troubles psychiatriques, toxicomanies) pour consulter un médecin ou entrer dans une pharmacie, nonobstant le bénéfice d’une protection sociale (généralement aide médicale de l’État (AME) ou couverture maladie universelle (CMU). Afin de ne pas générer de crise sanitaire ou humanitaire liée à l’absence de traitement de ces populations, il est nécessaire de mettre en place une procédure d’approvisionnement, opérationnelle au 1er janvier 2009. Les modalités pratiques sont en cours d’élaboration par les services du ministère chargé de la santé. Le ministère chargé de la santé a d’ores et déjà prévu un dispositif juridique permettant d’encadrer, dans un souci de sécurité sanitaire, les modalités de délivrance de médicaments par les structures de soins aux personnes en situation de précarité gérées par des associations caritatives. Ces structures sont autorisées par la loi n° 2008-337 du 15 avril 2008 à délivrer des médicaments, après déclaration préalable auprès du représentant de l’État dans le département. Le décret d’application n° 2008-784 du 18 août 2008 relatif à la distribution humanitaire de médicaments précise les conditions de délivrance de médicaments par ces structures de soins sous la responsabilité d’un pharmacien ou à défaut, d’un médecin. Il importe, en outre, de signaler que les industriels du médicament se sont engagés à apporter une aide aux associations humanitaires en médicaments, en fonction de demandes précises fondées sur des projets évaluables et traçables, via un établissement pharmaceutique de distribution en gros à vocation humanitaire. Ces projets devront respecter les bonnes pratiques de dons de médicaments prévues par un arrêté du 18 août 2008. Enfin, le ministère chargé de la santé a conclu une convention de partenariat avec Réseau Médicaments et Développement (ReMeD), qui s’appuie sur de nombreux partenaires dans le milieu associatif. Un financement associé a permis l’engagement d’actions d’information des petites associations françaises de solidarité internationale, utilisant occasionnellement des MNU sans être spécialisées dans le médicament. Ainsi, dans toutes les régions françaises, le ministère et ReMeD informent des enjeux de la décision d’interdiction de l’utilisation des MNU et accompagnent ces associations vers d’autres formes d’aide et d’actions de coopération locale.
Question publiée au JO le : 16/12/2008 page : 10863
Réponse publiée au JO le : 27/01/2009 page : 881
Un commentaire
Je plains Mme Bachelot qui doit assumer sa soumission au lobby pharmaceutique.
1. “Pas adaptés aux besoins” ?
A entendre Mme Bachelot (et les lobbies) les médicaments récupérés jusqu’alors étaient ceux destinés à soigner des pathologies des pays riches et ne correspondraient pas aux besoins des pays pauvres.
Dans les études, il est ainsi dit que l’on récupère par exemple des psychotropes, des médicaments contre le vieillissement ou contre la surcharge alors que les pays pauvres ont besoin d’antibiotiques, d’anti-inflammatoires, de vaccins.
Problème…Ceci est un argument fallacieux. Bien ridicule. Il date en effet : les associations ont bien pris la mesure du problème et, en général, leurs dotations répondent à des besoins exprimés par des partenaires dont les compétences sont vérifiées. En outre, quand bien même peu de médicaments utiles seraient collectés, il me semble que c’est toujours ça de pris…!
Enfin, il n’y a pas que des associations travaillant avec les pays du tiers-monde qui sont concernées : il y a aussi des besoins humanitaires en médicaments gratuits pour l’Europe et la France qui ne seront plus couverts !!! Il n’y a pas que des “riches” en France, en Europe…
2. “Risque de détournement” ?
Dans un de ses rapports, l’IGAS a en effet pointé du doigt quelques pharmaciens véreux en France qui avaient revendu les médicaments ainsi collectés. Mais faut il condamner l’ensemble pour quelques uns ?
Dans ce cas, supprimons aussi la classe politique, dans son entier…Au lieu de tenter de séparer le bon grain de l’ivraie !!!
Est-ce un argument suffisant pour remettre en question tout le système ? Va-t-on supprimer les allocations familiales pour quelques fraudes ? D’ailleurs, si les pharmaciens les ont revendus, c’est qu’ils étaient ” revendables ” donc, correctement conditionnés, avec une date d’utilisation non dépassée, et correspondant à une demande du client. Et pourquoi ne le permettrait-on pas, d’ailleurs, pour éviter le gaspillage ?
Le pharmacien les rachèterait d’occasion, à un tarif moindre et pourrait les revendre moins cher au client . Peut-être y a-t-il à creuser de ce côté. Pour ce qui est du trafic dans les pays extérieurs, là aussi, les associations ont pris le maximum de précautions : transport par leurs soins, remise à des correspondants connus, suivi de l’utilisation etc.
Pour terminer, au lieu d’interdire cette mesure, n’aurait on pas pu améliorer son concept ?
Un ami m’avait informé (il y a maintenant un bout de temps, mais çà reste à mon avis cohérent) qu’il avait transporté 700 Kgs de médicaments collectés par trois pharmacies en un mois. A première vue de nombreux emballages étaient instacts !!!!
Alors que tout les ministères cherchent à faire des économies, n’y a -t-il pas une recherche à faire dans le mode de distribution de ces médicaments. Certains pays européens ne donnent que le nombre précis de cachets. Les emballages sont trop souvent inadaptés aux posologies des médecins.
Il y a sûrement quelques milliards par an à économiser, ce qui ferait du bien à la sécurité sociale !!!
De quoi faire plaisir à Monsieur Bertrand, qui a l’époque expliquait que “le coût de leur collecte et de leur acheminement serait supérieur, en général, au prix des génériques.”
Lobby Pharmaceutique : encore gagné !!!
Y a t il encore des députés non influençables, ou tout au moins corruptibles à très long terme ?
J’avoue me le demander de plus en plus sérieusement…
Enfin…Une preuve de plus que le Parlement est à la botte des lobbies. Et la France, une fois de plus, reléguée sur le banc de touche.
Pourtant, elle mériterait vraiment d’avoir des personnes pour la servir, en lieu et place des parlementaires qui se servent d’elle pour plaire à tel ou tel lobby.
Si encore le Parlement était influençé par des “bons” lobbies ! Mais évidemment, entre le lobby pharmaceutique, et les malades…On sait à qui les entrées du Palais Bourbon et du Luxembourg sont ouvertes.