L’Assemblée nationale a adopté ce soir le projet de loi instituant un service civique. Je suis intervenu en séance publique. Voici le compte-rendu de mon intervention :
M. Christian Vanneste. Madame la présidente, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, en politique comme dans beaucoup d’autres domaines, ce n’est pas l’idée qui compte, mais sa mise en œuvre. Le service civique est une excellente idée ; sa mise en œuvre est difficile, voire périlleuse.
C’est une excellente idée qui cherche à répondre à l’angoissante question de l’intégration sociale. À force de n’être composée que d’individus économiquement complémentaires, passant d’une famille de plus en plus éclatée à une vie de travail de plus en plus nomade, à aucun moment notre société ne suscite ce sentiment d’appartenance auquel Mme la rapporteure est justement attachée, ni ne répond au besoin de solidarité, de sorte que ses membres sont tentés de trouver refuge dans toutes sortes de communautarismes de substitution.
Michèle Alliot-Marie jugeait récemment la question de l’unité nationale plus fondamentale que celle de l’identité nationale. S’interroger sur le fait de savoir qui nous sommes révèle plus une inquiétude qu’une certitude. L’important, aujourd’hui, est peut-être davantage de savoir ce que nous avons envie de faire ensemble, et si nous en avons encore envie.
M. Régis Juanico. Eh oui !
M. Christian Vanneste. Le service national apparaît à beaucoup comme ce moment privilégié où les Français de tous horizons venaient précisément vivre ensemble, partager un projet commun et donner de leur temps personnel à la communauté nationale. C’était un de ces rites d’initiation fondateurs du sentiment d’appartenance, rites durant lesquels la complémentarité devient ressemblance. Plus la démocratie et la République ont gagné, plus elles ont exigé ce don de soi, égalitaire et universel. Aussi est-ce avec une certaine nostalgie – une nostalgie quelque peu amnésique car l’institution était devenue essentiellement masculine et de moins en moins égalitaire avec le temps – que l’on regarde aujourd’hui la place vide. Le service civique serait donc chargé de la remplir afin de viser à nouveau les objectifs du service national : d’abord celui de brasser les personnes, de réaliser une véritable mixité sociale ; ensuite, celui de permettre à toute une génération d’accomplir ce rite du don sans lequel il n’y a pas de véritable communauté ; Enfin, celui de servir, en les apprenant, les valeurs de la République.
Mais là commencent les difficultés.
La première est de taille : le service civique ne pourra, dans le meilleur des cas, qu’être proposé à quelques dizaines de milliers de personnes pour une classe de 750 000 jeunes dont 600 000 seulement pourront être concernés. Le service civique ne peut donc être obligatoire, parce que nous n’en avons pas les moyens. J’avais souhaité pour ma part qu’il le soit pour tous ceux qui postulent un emploi public statutaire. Je regrette de ne pas pouvoir défendre l’amendement correspondant à cette proposition, en raison de l’article 40. Il faut noter que le système italien, dont Luc Ferry a vanté le succès, comprend un avantage de points pour les concours d’accès à la fonction publique.
Le service civique doit être rigoureusement distingué du bénévolat. Celui-ci est l’occasion pour une personne généreuse de servir une cause qui la passionne. Le bénévolat est personnel, il n’est pas nécessairement citoyen. Le service civique est un échange symbolique entre un citoyen et la cité : il doit reposer sur un engagement, concentré dans le temps et l’espace, imposant des contraintes, notamment celle de travailler et de vivre avec des Français venus d’autres horizons. Ce n’est pas la même chose de participer gratuitement à l’entraînement d’une équipe de foot, le week-end, dans un quartier de la ville qu’on habite, même si le but est l’insertion, et d’aller pendant six mois dans une autre ville participer, avec toute une équipe, à une campagne contre l’illettrisme.
M. Patrick Beaudouin. Très juste !
M. Christian Vanneste. Le service civique est un échange qui doit comprendre, d’une part, un apport de la personne qui fournit son temps et ses compétences, et, d’autre part, une reconnaissance de la société sous forme d’une indemnité, d’une valorisation des acquis de l’expérience, d’une protection sociale, d’une acquisition de droits à la retraite, voire d’un accès à certains emplois, sans que tout cela puisse si peu que ce soit remplacer un véritable emploi ni lui faire concurrence.
De plus, il est important que la dimension sociale et nationale du service civique soit claire dans les missions qui lui sont confiées. Celles-ci doivent être peu nombreuses, et fédérées autour de grandes priorités nationales ; elles doivent correspondre à des luttes coordonnées contre les retards ou les fléaux qui touchent notre pays à travers, par exemple, la prévention en matière de santé, la lutte contre l’illettrisme, l’accompagnement des personnes âgées, l’encadrement des travaux d’intérêt général.
Enfin, il subsiste un écueil et un paradoxe : ceux qui vont s’engager dans le service civique seront ceux qui assument une citoyenneté pleinement consciente ; ceux qui sont exclus d’un tel sentiment ne feront pas ce choix alors qu’ils en tireraient le plus grand bénéfice pour eux-mêmes et pour la société. L’information la plus large, la motivation la plus précoce et la plus persuasive sont donc nécessaires. La journée d’appel et de préparation à la défense qui a un autre objet est très insuffisante…
M. Claude Bodin. Tout à fait !
M. Christian Vanneste. …et trop tardive pour répondre à ces préoccupations. Il est nécessaire que l’information soit diffusée en amont à l’école, au collège et au lycée par des présentations mises en œuvre par l’agence du service civique.
Mme Claude Greff, rapporteure. Très bien !
M. Christian Vanneste. Tel est le sens qu’il faut donner au troisième alinéa de l’article consacré à celle-ci.
Pour conclure, je pense que c’est de la qualité et du rayonnement de l’agence que dépendra le succès du service civique. C’est une administration qui ne pourra réussir sans un supplément d’âme, sans être habitée par le sens de sa mission. Cela est encore plus important que la question des moyens dont elle disposera. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
4 commentaires
J’ attend que des voix s’éleve:
Mercredi soir, deux individus ont pénétré dans le presbytère pour soutirer violemment de l’argent à un prêtre auxiliaire âgé de 83 ans
@Marie
L’une des devises de l’association Légitime Défense est :
“Les hommes ne sont pas pendus pour avoir volé des chevaux, mais pour que les chevaux ne soient plus volés” !
Tout le reste n’est que littérature …
Lu sur “l’observatoire du Parlement” !
“Le haut-commissaire aux Solidarités actives et à la Jeunesse Martin Hirsch a annoncé jeudi 5 février à l’Assemblée nationale que le service civique volontaire — d’une durée de 6 à 12 mois — devrait voir le jour progressivement cette année. 10.000 jeunes engagés sont prévus pour 2010, puis 25.000 l’année prochaine, 40.000 en 2012 et jusqu’à 75.000 en 2015. Parmi les offres de « service » proposées : l’éducation sexuelle dans les écoles.”
Malheuresement, il ne s’agit pas d’une blague. Comme idéal de service rendu à la société, on donnera à des jeunes l’exaltante mission de démontrer à des plus jeunes comment on se sert d’un préservatif… voilà ce que devient la citoyenneté !”
Et on rabaisse la République ! Pas besoin d’ennemis pour la République, ses “défenseurs” légitimes savent lui porter les plus durs coups !
@Marie,
J’ai bien peur que vous pouvez attendre longtemps que des voix s’élèvent …
Que voulez-vous, face à la délinquance, ce sont les bras en l’air, comme en 40 face au nazisme !