M. Christian Vanneste attire l’attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur le fait que, dans de nombreux pays en voie de développement, de plus en plus de litiges touchent à des questions d’ordre foncier. Cela encombre les tribunaux dans ces pays, et a deux conséquences sur leur économie : la première est d’ordre financier, car les coûts sont importants pour ces États et la deuxième est le fait que ces litiges sont un frein pour les investisseurs étrangers qui voient alors dans ces pays, une insécurité foncière majeure. Il souhaite donc connaître les intentions du Gouvernement à ce sujet.
Réponse du Gouvernement :
Les litiges liés à l’accès et à l’utilisation de la terre sur le continent africain sont une réalité préoccupante. Il est important de rappeler le contexte de pluralisme juridique, c’est-à-dire la coexistence de différents systèmes juridiques, écrits et oraux, dans la plupart des États africains. Les terres, notamment en milieu rural, sont considérées à tort comme disponibles alors qu’elles sont régies par les droits locaux en présence. Ces droits, quoique oraux le plus souvent, traduisent néanmoins l’occupation et l’usage et donc la maîtrise de ces terres par les populations locales. Ce contexte donne des éléments de compréhension à l’émergence de ces multiples conflits, souvent difficiles à résoudre et dont résulte une insécurité juridique pour tous les acteurs. En effet, ces litiges, et l’insécurité foncière qui en découle, affectent non seulement les investisseurs étrangers mais également les investisseurs nationaux et, notamment, les investissements réalisés par les producteurs à une échelle économique familiale. Aujourd’hui, le besoin important d’investissements étrangers et nationaux sur le continent ne doit pas occulter l’importante question de la sécurité alimentaire, de la lutte contre la malnutrition et la protection des ressources naturelles renouvelables. Trois axes de travail sont identifiés : comment investir de manière responsable au regard des contraintes sociales et environnementales ? Comment accroître la production alimentaire et les revenus afférents ? Et enfin, comment sécuriser les droits d’accès et d’occupation des différents acteurs ? Au niveau national, différentes structures ministérielles se préoccupent de ces questions qui ne sont pas nouvelles. Ainsi, depuis dix ans, le comité technique foncier et développement (CTFD), coprésidé par le ministère des affaires étrangères et européennes et l’Agence française de développement, a pour ambition, par les études et projets qu’il mène avec son réseau de chercheurs et d’experts, d’appuyer, à la demande des gouvernements, les politiques publiques foncières et les éventuelles réformes du cadre juridique. Par ailleurs, en avril 2010, le comité technique foncier-développement et le groupe interministériel pour la sécurité alimentaire (GISA), composé des ministères de l’agriculture, de la direction générale du Trésor et de la direction générale de la mondialisation du ministère des affaires étrangères et européennes (MAEE), a remis la note de positionnement français sur « l’appropriation de terres à grande échelle et investissement agricole responsable ». Outre l’analyse que ce papier de positionnement propose dans le cadre des débats internationaux, il rassemble également un ensemble de recommandations pour notre coopération dans le champ de la gouvernance et de politiques foncière, intégrant la problématique de la régulation des appropriations massives de terres et du cadre juridique des investissements. Le rapport du groupe de travail sur « Les cessions d’actifs agricoles à des investisseurs étrangers dans les pays en développement » (remis fin juin 2010) mis en place, à la demande de la secrétaire d’État à la prospective et au développement de l’économie numérique, par le Conseil d’analyse stratégique (CAS), dresse un état des lieux de la question et formule des préconisations pour aider les investisseurs à agir de manière responsable aussi bien d’un point de vue social qu’environnemental. Concernant précisément la question de l’insécurité juridique des investisseurs étrangers, le groupe de travail préconise que : i) la France et l’Union européenne signent avec les pays qui accueillent des investisseurs européens des accords de partenariat destinés à développer leur secteur agricole et à sécuriser les investissements ; ii) la France, compte tenu de son expertise dans ce domaine (CTFD), appuie des processus de réforme foncière qui respectent les usages locaux et permettent de sécuriser les investissements. Au niveau européen, le MAEE est chef de file de la réflexion sur le sujet des acquisitions massives de terre depuis octobre 2009 dans le sous-groupe de travail, présidé par la Commission européenne, consacré au foncier qui se réunit sous l’égide du groupe informel des chefs « agricultures et développement rural » des États membres. Le MAEE s’attache également au niveau international à renforcer ses liens avec les institutions soucieuses de faire émerger un cadre propice à la sécurité des investissements responsables. Il est ainsi engagé dans différents processus relatifs aux investissements et à la gouvernante foncière telle l’initiative de l’organisation pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) qui a pour mission d’élaborer des directives volontaires sur la gouvernance responsable de la tenure des terres et des autres ressources.
Question publiée au JO le : 29/06/2010 page : 7103
Réponse publiée au JO le : 17/08/2010 page : 9022
Réponse publiée au JO le : 17/08/2010 page : 9022