M. le président. La parole est à M. Christian Vanneste, pour soutenir l’amendement n° 77.
M. Christian Vanneste. J’ignore si cet amendement est technique ou politique ; en tout cas il concerne la famille, sujet éminemment politique, mais qui peut être résolu de manière technique. Il vise à souligner le rôle essentiel des familles dans la solution du problème des retraites.
Le 26 novembre 2008, le Conseil d’orientation des retraites a formulé des propositions sur les majorations familiales des retraites. Il s’agissait là d’un véritable contresens car si les cotisations versées par une génération servent bien à payer les pensions des générations précédentes à la retraite, c’est l’investissement dans l’éducation des enfants d’une génération qui sera vraiment utile au financement des retraites de cette génération. Voilà comment se pose le problème démographique.
Alfred Sauvy résumait fort bien cette question. Selon lui, chaque génération doit payer elle-même ses retraites non par les cotisations, comme certains l’imaginent, mais par sa descendance.
Ainsi, un couple exerçant une profession intermédiaire qui a élevé un seul enfant aura investi deux fois moins dans la génération à venir que la retraite qu’il percevra. Un couple exerçant lui aussi une profession intermédiaire mais qui aura élevé quatre enfants subira en revanche une perte de 25 % entre son investissement et sa retraite alors que son effort permettra à la génération de ses enfants de payer le double de cotisations vieillesse. Il y a là manifestement une injustice qu’il faut prendre en considération.
Le rapport que je demande au COR par le biais du présent amendement aura donc pour but d’établir un tableau précis de la situation des droits des assurés en fonction de leur investissement dans la génération à venir, afin de pouvoir y introduire plus d’équité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Denis Jacquat, rapporteur. Avis défavorable.
Je répète que le COR, composé de personnes provenant de différents horizons, établit des constats et ne formule pas de propositions. L’année dernière, une importante étude, M. Vanneste l’a rappelé, a été réalisée sur les avantages conjugaux et familiaux. D’autres travaux de ce genre continueront d’être menées – leur qualité n’a jamais été mise en cause. Au vu de leurs résultats, il nous reviendra de prendre des décisions.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre du travail. Le COR définit d’ordinaire lui-même son programme de travail. Il est arrivé que dans le cadre d’un PLFSS, si mes souvenirs sont bons, on lui demande un rapport sur les régimes notionnels ; cela s’explique par l’ampleur de l’enjeu.
Le COR s’est déjà saisi des questions sur les avantages familiaux et avait remis un rapport en 2008, actualisé en 2010. Si les membres du COR, parmi lesquels figurent, du reste, des parlementaires, souhaitent qu’on lance une étude sur les sujets que vous évoquez, monsieur Vanneste – et ils sont légitimes –, il revient au seul COR d’en décider.
Je vous serai donc reconnaissant de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. La parole est à M. Christian Vanneste.
M. Christian Vanneste. Monsieur le ministre, je reviens sur la distinction entre le technique et le politique : mon amendement est très politique. Il s’agit simplement de faire en sorte que l’on souligne le rôle de l’investissement familial dans la préparation des retraites, ce qui n’est pas une mince affaire. Que le COR, organisme indépendant, soit allé dans un sens inverse, appelle de notre part une prise de responsabilité : qu’il tienne compte des modèles de projection précisément indiqués dans mon amendement et qu’il en mesure les conséquences en termes d’investissement familial.
Cette demande étant donc très politique, nous devons exercer notre responsabilité. La réponse du COR peut certes me décevoir d’un point de vue technique. Je maintiens néanmoins symboliquement mon amendement pour bien marquer cette volonté politique.
(L’amendement n° 77 n’est pas adopté.)