Parmi les marronniers chers au monde médiatico-politique, figure en bonne place la surpopulation carcérale. Mme Taubira, le nouveau Garde des Sceaux s’est empressée de le replanter pour la rentrée. Comme d’habitude, avec les intonations apitoyées de circonstance à l’égard des détenus, les journalistes ont souligné le scandale français de la suroccupation des prisons, dénoncé les conséquences de la politique répressive de Sarkozy, et envisagé d’une manière bienveillante l’idée ministérielle d’introduire des peines de probation, sans incarcération pour les condamnés à moins de deux ans de privation de liberté, inspirée d’une législation canadienne.
Ceci suscite TROIS REMARQUES :
La comparaison avec l’étranger montre que le problème de notre pays ne réside pas dans le trop grand nombre de détenus, mais dans le nombre insuffisant des places propres à les accueillir. Sans oser la comparaison avec les Etats-Unis qui détiennent…le record mondial avec 2,3 millions de prisonniers, soit 714 pour 100 000 habitant, il paraît opportun de rappeler qu’en Europe, la France ne connaît pas un taux de détention anormal : 115 pour 100 000, contre 228 pour la Pologne, 156 pour l’Angleterre, 152 pour l’Espagne et 109 pour l’Italie. Tous ces pays, comme le nôtre ont connu une augmentation. Le taux de suroccupation de nos prisons n’est pas un record, lequel appartient à l’Espagne après huit ans de socialisme et 140 détenus pour 100 places contre 117 chez nous. Le taux quebecquois est de 116, ce qui devrait nous rendre circonspects sur le miracle canadien. La vérité première est que nous n’avons pas construit les cellules nécessaires et que ce gouvernement est confronté, comme ses prédécesseurs à la gestion hôtelière des lieux de détention, avec cette différence que la droite fait des efforts ( 12000 places prévues en 2002, et 10000 réalisées, puis 24000 annoncées en 2012, afin d’atteindre une offre de 80000) tandis que la gauche qui nourrit un préjugé idéologique à l’encontre de la prison, soit ne fait rien, soit diminue l’effort, soit essaie de trouver des solutions palliatives. Après la première solution des derniers gouvernements socialistes, Mme Taubira a choisi la seconde en limitant le nombre des places créées à 6000, puis la troisième avec son projet. La population française croît et est relativement jeune, le nombre des crimes et délits a considérablement augmenté, notamment sous l’ère Jospin, qui ne connaissait effectivement pas de surpopulation carcérale. L’Allemagne, plus peuplée et plus vieille connaît un nombre de crimes et délits violents de 211000 contre 332000 chez nous. C’est une réalité sociologique que nous ne pouvons ignorer.
En second lieu, il est en revanche utile de diversifier les réponses pénales, à condition qu’elles ne soient pas destinées à cacher la réalité du problème. La dernière loi pénitentiaire partait du constat effrayant d’un stock de 82000 peines en attente d’exécution, et de 20% par an de condamnations à la prison ferme non exécutées. Elle avait donc, dans une dérive déjà inquiétante, mis l’accent sur les aménagements de peine et sur le gadget des bracelets électroniques, notamment pour les condamnés jusqu’à deux ans. En mars dernier, une adolescente de 15 ans a été tuée par un condamné qui avait arraché son bracelet, et chacun a en mémoire les noms des victimes assassinées par des meurtriers libérés avant l’heure et qui auraient toujours dû être incarcérés à la date de leur crime. Les solutions sont ailleurs : d’abord dans l’accélération des procédures judiciaires. Il n’y a pas de surpopulation dans les Etablissements pour Peine, mais dans les Maisons d’arrêt, en raison de la malheureuse exception française du trop grand nombre de personnes en attente de jugement. Ensuite, il faut effectivement substituer les Travaux d’Intérêt Général aux peines de privation de liberté, et notamment pour les primodélinquants condamnés à moins de SIX MOIS. J’avais déposé, en septembre 2009, une Proposition de Loi destinée à les promouvoir suivant le modèle suisse. Le fait que l’on reparte sur une procédure plus lourde pour la substituer à des peines plus longues alors que les Tig sont insuffisamment mis en oeuvre, comme je l’avais souligné dans un rapport remis à Michèle Alliot-Marie, est plus que préoccupant quant à la véritable finalité du projet actuel.
Enfin, même si le Ministère de la Justice a été privilégié, ces dernières années, sur le plan budgétaire, on comprend que le gouvernement actuel essaie de diminuer la dépense qui résulterait de la réalisation d’un nombre tout-à-fait normal de places de détention pour un pays comme la France. On comprend plus mal sa volonté de mettre en oeuvre un processus pénal qui demandera un encadrement lourd et continu, sauf à imaginer qu’il n’en exigera pas une efficacité maximale. La France est l’un des rares pays, européens notamment, avec l’Espagne et le Danemark, qui n’obligent pas leurs condamnés à travailler. Il serait légitime que le coût d’entretien et d’hébergement soit, au moins en partie pris en charge par le travail des condamnés, qui trouveraient par ce biais également les moyens d’indemniser leurs victimes et peut-être le chemin de leur réinsertion. J’avais déposé une Proposition de Loi en ce sens le 22 Février dernier, pour revenir sur la Loi de Juin 1987 votée malheureusement par la droite.
La proportion est au coeur même du concept de Justice : proportion des peines aux actes commis certes, mais proportion aussi des prisons au nombre des condamnés qu’elles doivent NORMALEMENT accueillir !
4 commentaires
“Les solutions sont ailleurs : d’abord dans l’accélération des procédures judiciaires.”
Il me semble que cela impliquerait la simplification du Code de procédure pénale ; la complication de ce Code aboutit régulièrement à la libération d’auteurs de crimes ou de graves délits.
vous avez totalement mon soutien a propos de votre declaration qui vous a valu d’etre éxclu de l’ump.
anti homophiles je suis et je le resterai
Lors d’une réunion publique j’avais fait la même réflection à Eric Ciotti concernant le travail des prisonniers,on m’a répondu que les “droits de l’homme” nous l’interdisait !! Je lui ai répondu que certains prisonniers étaient mieux traités en prison que chez eux.
Il y a une confusion entre le travail forcé et l’obligation de fournir un travail en compensation du coût que représente l’incarcération pour la collectivité. En Europe, seule une minorité d’ETATS s’imposent de ne pas y avoir recours, pour des raisons historiques, la France et Cayenne, l’Espagne et Franco etc…