En ce jour qui est le plus important de l’année chrétienne, le plus difficile est de faire preuve d’humilité. C’est la commémoration de ce qui contitue l’originalité la plus remarquable de cette religion “à part”. Les autres adorent des dieux auxquels il faut se soumettre, qui exigent parfois des sacrifices, et qui ont même souvent l’esprit vengeur plus que miséricordieux. Le Dieu Chrétien est un Dieu d’amour, qui a inversé le sens du sacrifice puisqu’il a offert son Fils aux hommes pour leur indiquer le chemin, leur enseigner l’amour du prochain dans la vérité, et leur apprendre à respecter et proclamer la vie. La vie qui est célébrée en ce jour de la résurrection du Christ est au coeur de la foi chrétienne beaucoup plus que la peur de la mort car elle est avant tout un principe spirituel, celui par lequel on ne meurt pas à la vérité. L’une des chaînes d’information, ce matin, se demandait ce qu’étaient les catholiques, comme s’il s’agissait d’une peuplade étrange et en voie de disparition. Elle annonçait par ailleurs le remboursement à 100% de l’avortement et la gratuité de la pilule pour les mineures. En quelques minutes, se révélait le désert spirituel d’un quotidien sans autre relief que les nouvelles du jour, les prouesses des chocolatiers et la qualité exceptionnelle de la poudreuse sur les pistes aussi tard en saison. La révolution métaphysique de la religion chrétienne, le rôle immense de l’Eglise Catholique dans notre civilisation et dans notre histoire, l’accroissement du nombre des fidèles dans le monde sont étrangers à cette vision éphémère et étriquée, autocentrée sur un pays réduit à une foule d’individus consommateurs et hédonistes. La vérité libère car elle permet de redonner de l’authenticité à son existence, d’assumer les choix dont on se sait responsable, d’échapper au bavardage à la mode pour redonner un sens aux mots de la tribu.
Non, il n’est pas facile, en ce jour, d’être humble. Pour la troisième fois, de manière éclatante, l’Eglise a fait un choix manifestement inspiré. Après l’athlète de Dieu, Jean-Paul II, l’intelligence lumineuse de Benoît XVI, clairvoyant jusque dans sa renonciation, voici que le Pape François rappelle que la charité dans la vérité doit non seulement se démontrer, mais aussi se montrer. Voici qu’il accorde les deux faces de la vérité, celle des valeurs sur lesquelles l’Eglise ne transigera jamais, parce qu’elles s’inscrivent dans la réalité de l’Homme aussi bien que dans sa dignité morale, et celle des actes, des preuves d’amour, que l’Eglise doit plus que jamais donner. Comme l’a justement dit le Saint-Père, l’Eglise n’est pas une ONG, et encore moins un propriétaire de locaux vacants que certains voudraient réquisitionner. Les oeuvres charitables qui dépendent d’elle ou qui sont inspirées par la foi chrétienne sont considérables, mais il ne s’agit pas d’une assistance sans âme. C’est un message en actes qui vise non seulement à restaurer l’homme dans sa dignité physique et morale, mais aussi à le relever spirituellement, à lui rendre ce souffle vers la Transcendance comme une graine se délivre de son enveloppe, un poussin de son oeuf, ou un bébé du ventre sa mère. C’est le sens de cette image du Pape lavant les pieds de douze jeunes dans une prison de Rome.
C’est en cela que doit se situer la raison de notre humilité. Pâques n’est pas la fête de la naissance, mais celle de la renaissance. Elle nous rappelle que l’on peut et que l’on doit, à l’image du Christ, revivre, mais que nous sommes, à des degrés divers, morts, à la vérité, à notre authenticité, à la liberté de vouloir être à la hauteur de ce dont l’homme est capable. Pâques, c’est la fête de la modeste deuxième vertu, un peu perdue entre ses grandes soeurs,la Foi et la Charité, celle dont parle Péguy, l’Espérance.
2 commentaires
Merci de dire si bien, ce que je pense, et n’ai pas toujours la force d’exprimer…
merci aussi de votre profession de Foi; par les temps qui courent, il n’est pas facile en France de n’être pas politiquement correct…