Le 14 Juillet approchant, on peut s’interroger sur la Révolution. Beaucoup de pays n’ont pas fait de révolution ou se sont contentés d’en faire peu, mais définitives. L’exemple du Royaume-Uni qui a achevé la sienne un siècle avant que nous ne commencions la première est humiliant. Ses institutions ont évolué ensuite progressivement tandis qu’il devenait la première puissance mondiale en surclassant la France. Pendant que la Grande-Bretagne est toujours une monarchie constitutionnelle qui s’est simplement adaptée aux nécessités du temps, mais sans constitution rigide, notre pays, enclin sans cesse à donner des leçons aux autres en se rengorgeant sur sa glorieuse révolution, offre aujourd’hui un spectacle affligeant. Trois ou quatre révolutions plus tard, quatre occupations après, et à la suite d’une quinzaine d’essais constitutionnels ratés, les Français constatent que la Ve République, elle-même réformée à plusieurs reprises, est à bout de souffle. Ce matin-même, Christian Estrosi sur BFM affirmait qu’il fallait une révolution.
Une telle déclaration est consternante. Pourtant elle n’est pas infondée. Une nation qui au début des années 70 affrontait l’évolution du monde avec vigueur et intelligence, en valorisant ses atouts, est en passe de devenir l’homme malade de l’Europe. Toutes les courbes indiquent les progrès de la maladie. Le malade ne s’est jamais soumis à un régime sérieux en s’appuyant sur une bonne santé qui faisait l’admiration des autres. Avec nostalgie, il lui arrive de rappeler son état exceptionnel. Malheureusement, son exception est devenue un contre-exemple, celui d’un Etat abandonné entre les mains de dirigeants dénués de courage voire d’intelligence, en tous cas, incapables de sacrifier leurs intérêts politiciens au Bien Commun. Car le problème français est bien celui de la qualité de ceux qui le dirigent plus que celui des institutions. De Gaulle, à Londres, admirait chez les Britanniques cette attitude qui consistait pour chacun d’entre-eux à considérer que la survie de l’Angleterre dépendait aussi de lui. Au “chacun pour tous” jusqu’au plus humble sujet de sa Gracieuse Majesté au-delà de la Manche, répond chez nous le “chacun pour soi” jusqu’au sommet de l’Etat.
Un Président au pouvoir grâce à un triple mensonge, sur l’état du pays, sur son combat contre les riches et la finance, et sur la faisabilité de son programme, dirige et symbolise la France en ayant perdu sa légitimité morale, et donc réelle aux yeux des Français. Des partis politiques remplis d’incapables ou de corrompus bloquent le système à leur profit. L’opposition, qui critique la gestion actuelle présente le paysage désolé de rivalités sans merci entre des ambitieux dont le bilan n’est guère brillant, les méthodes douteuses, et l’honnêteté mise gravement en doute. Comment ? Des gens qui ne savent pas gérer leurs propres comptes avec compétence et sérieux voudraient qu’on leur confie les deniers de la République ? Des syndicats totalement irresponsables bloquent les réformes les plus nécessaires sans prendre en considération l’intérêt général, mais en obéissant uniquement à deux impératifs : satisfaire des privilèges catégoriels, ou défendre l’avantage concurrentiel, en matière de démagogie, de leur “boutique”. Privilèges, concurrence, ces objectifs syndicaux pourraient faire rire… L’asphyxie économique de la Corse avec le conflit de la SNCM, les grèves à la SNCF, évidemment scandaleuses lorsque le rapport sur la catastrophe de Brétigny nous apprend combien le prétendu service public a été défaillant, le refus de participer à la Conférence Sociale, sont les signes terribles de notre archaïsme, et de l’incapacité des dirigeants syndicaux de prendre en compte le Bien Commun.
Que la France ait besoin d’une révolution est une évidence. Mais, il ne s’agit pas tant de changer les institutions que de changer les hommes et les femmes qui peuvent redresser la France. C’est seulement en exigeant d’eux une révolution morale que l’on pourra espérer réussir. Cette exigence doit être la priorité absolue. Les réformettes actuelles, sur le découpage territorial, par exemple ne sont que des pétards mouillés auprès de cette bombe salutaire, de ce grand nettoyage indispensable.
Un commentaire
Non pas changer les hommes, mais changer d’hommes.
D’institutions aussi. Le Préambule de 1946, qui nous impose l’immigration incontrolée, et l’article 55 C., qui nous soumet au droit dérivé de l’U.E., sont des obstacles majeurs au redressement du Pays. De même le financement public des partis, véritable conflit d’intérêts permanent.
Bref, la réforme devra être au moins autant intellectuelle que morale. Pour Renan, l’un n’allait pas sans l’autre.