En cette veille de Noël, il est préférable de restreindre ses envies belliqueuses, mais c’est cette année une obligation à laquelle il est difficile de se soumettre. Que le Président de la République, une fois encore en déplacement, lance une de ses petites plaisanteries aussi déplacées que lui, disant qu’il est le Père Noël à des enfants de Miquelon, n’est pas seulement grotesque, c’est insupportable. Cinq points de gagnés dans un sondage et le Président massivement rejeté par les Français ne se sent déjà plus. S’il ne leur fait guère de cadeaux, comme en témoignent les derniers chiffres du chômage( + 27400 à près de 3,5 millions en cat A métropole), on ne peut certes lui reprocher de croire au Père Noël, pour lui-même. Celui-ci a déposé devant la cheminée de l’Elysée trois présents inespérés, qui en l’occurrence ne récompensent pas la bonne conduite des dirigeants français : la baisse du prix du pétrole destinée à étrangler la Russie, mais aussi à freiner la production américaine en favorisant les produits plus faciles d’accès en provenance du Golfe ; le recul de l’Euro qui dopera les exportations et gênera les importations ; les taux d’intérêts miraculeusement bas qui permettent à la France de poursuivre un endettement irresponsable car destiné au fonctionnement et non à l’investissement. La politique menée par la France n’est pas seulement étrangère à ces trois bonnes nouvelles apparentes, elle en reçoit la grâce de pouvoir persévérer dans l’erreur en bénéficiant d’une impunité provisoire.
Le premier cadeau est dû au jeu compliqué des deux vieux alliés que sont les Etats-Unis et l’Arabie Saoudite. Entre la grande démocratie brandissant ses valeurs humanistes à travers les discours d’Obama, et le royaume wahabite, fondé sur l’absolutisme, l’inégalité et la Charia la plus implacable, aucune pensée commune, mais des intérêts géopolitiques et économiques beaucoup plus puissants que les idées philosophiques : le pétrole, la protection des approvisionnements en échange de celle du régime, l’hostilité à la Russie et à ses alliés chiites. Les Chrétiens chassés de Karakosh par l’Etat islamique fêteront Noël, pour ceux qui ont survécu, chez les Kurdes. Ces derniers ont du pétrole et depuis longtemps l’Amérique s’intéresse à leur sort. Elle semble moins pressée d’en finir avec les islamistes dont elle pourrait ne faire qu’une bouchée. Mais, chut ! Cela aiderait Bachar Al-Assad en Syrie, l’allié des Russes et perturberait sans doute le jeu pervers de la Turquie et de plusieurs Etats sunnites du Golfe, eux-aussi alliés de l’Oncle Sam.
Le second cadeau, le recul de l’Euro, est un cadeau empoisonné. Il redonne du crédit à une monnaie qui mécaniquement va renforcer les centres économiques les plus puissants de l’Union Européenne et affaiblir la périphérie. Les produits allemands se vendront encore mieux. Non seulement, cette embellie n’inversera pas le processus de déclin économique du continent européen dans le monde, mais encore ses causes sont lourdes de menaces. La Grèce est à la veille d’une crise majeure. L’Italie peine à se rétablir. L’Espagne rééquilibre ses comptes mais au prix d’un délabrement social insupportable. La France continue de jouer les enfants gâtés : dépense et emploi publics démesurés, déficits en tous genres, chômage et assistance en croissance continue. Un rebond industriel peut être engendré par une dévaluation monétaire, à condition d’avoir sauvegardé un outil industriel capable de rebondir. Or, le catalogue de mesurettes de M. Macron n’est pas à la hauteur de cet enjeu.
Le troisième présent contient un poison plus virulent encore. L’endettement du pays vient de dépasser les 2000 milliards. Il est de cinq points supérieur aux 90% dont une économie ne revient pas. Il n’est pas, comme le japonais ou même l’italien fondé sur l’épargne intérieure, mais sur l’appel au marché. L’afflux des liquidités, la libération des planches à billets créent une bulle qui peut à tout moment éclater. Les taux peuvent augmenter, et l’euphorie addictive laisser la place aux souffrances du manque. Si encore la France avait profité de la situation pour réformer et investir, les perspectives seraient dégagées, mais elle a fait tout le contraire. Cinquième puissance économique, administration fiscale solide et efficace, image historique et touristique positive, la France suscite encore la confiance. Mais elle ressemble de plus en plus à un village Potemkine. La façade pimpante cache mal la montée du chômage et de la pauvreté, la multiplication des inégalités et des fractures sociales, les risques de dislocation du corps social et d’affrontements entre “communautés” et territoires.
Trois cadeaux ? On pense aux Rois Mages et à la crèche. Ils avaient, selon Saint-Matthieu, suivi l’étoile pour déposer l’or, la myrrhe et l’encens aux pieds de Jésus. Mais ils l’avaient fait en se cachant du roi Hérode. En effet, les responsables politiques ne méritent jamais les cadeaux du ciel. Les seules récompenses auxquelles ils on droit sont celles dues à leur clairvoyance et à leurs efforts en vue du Bien Commun.
3 commentaires
Hollande c’est le père Noël mais version le Splendid uniquement. Nous arrivons en 2015 mais 2017 c’est encore loin. Cela va être long, très long d’attendre avec espérance son départ.
Très bon Noël, M. Vanneste.
J’ignore s’il est le Père Noël de qui que ce soit,en tout cas ce n’est pas lui le cadeau !
La question est pour moi: comment trouver une équipe politique capable de relever la France?
Je souhaiterais que les journalistes fassent leur travail : nous informer sur les hommes capables, surtout quand ils sont peu connus!
La guerilla entre ceux qui nous ont menés au désastre n’intéresse que le microcosme parisien, pas les citoyens…
Bonne Année, malgré tout…gardons l’espoir .