La confusion qui règne dans les esprits avant le second tour des élections législatives se traduit par deux sondages contradictoires effectués ces jours derniers. Le premier publié par LCI indique que 61% des électeurs souhaitent rectifier le vote du premier tour afin d’éviter la majorité excessive annoncée qui inquiète 53% d’entre eux et a laissé 52% d’insatisfaits. Le monopole politique du parti unique En Marche trouverait donc une majorité d’opposants. Un moment d’euphorie laisserait supposer que les électeurs brutalement réveillés de la séance d’hypnotisme collectif, à laquelle ils sont soumis depuis des mois, pourraient aller voter au lieu de s’abstenir, ou modifier leur choix du premier tour. Malheureusement, un autre sondage, dans Les Echos, dissipe cette illusion passagère. Il prévoit bel et bien une majorité macroniste de 470 sièges face à 80 LR-UDI, le reste allant d’abord à l’extrême-gauche, et le Front National pouvant n’avoir qu’un député. Derrière ces chiffres écrasants, apparaissent une fois de plus les ambiguïtés et la confusion qui dominent les scrutins de 2017. En fait, 30% des sondés désirent vraiment cette “chambre introuvable”, mais 18% souhaitent qu’elle s’oriente au centre-gauche alors que 18% la veulent de centre-droit. Bref, des gens qui votent à l’identique n’expriment pas le même voeu pour la politique à venir du pays. 34% refusent la perspective de cette majorité. Si l’on veut donner un sens à ces chiffres, on s’aperçoit qu’il y a un petit tiers qui accueille avec enthousiasme la victoire du macronisme et un gros tiers qui s’y oppose. Elle sera néanmoins éclatante parce que le troisième tiers, et le plus lourd, lui apportera ses voix avec la confiance aveugle d’une moitié de socialistes voyant en elle la continuité d’une politique de gauche et d’une autre moitié d’électeurs de droite attendant d’elle les réformes économiques salutaires. Le degré de résistance, nul chez les partisans directs d’En Marche, est faible chez les socialistes et les “républicains”, mais fort au Front National et à l’extrême-gauche. Ceci confirme la porosité des électorats qui explique l’effondrement du PS et de LR-UDI. Beaucoup de socialistes amers après un mandat calamiteux de leur camp ont trouvé refuge dans la survie d’un socialisme repeint à neuf. Richard Ferrand ne peut que les rassurer. Avec lui, le socialisme qui vampirise notre pays depuis des lustres n’est pas mort, il a seulement fait un peu de chirurgie esthétique. Nombreux aussi sont les électeurs habituels du centre-droit qui ont porté leurs suffrages sur les candidats inconnus, muets ou invisibles, qui se cachent derrière la pancarte. Leur aveuglement est beaucoup plus irresponsable. Certains avaient d’excellents parlementaires dont le travail n’a pas été pris en considération, au risque de voir disparaître de l’Assemblée des convictions qui ne seront plus représentées alors qu’elles existent dans l’opinion ou des compétences qui lui sont indispensables. Le “dégagisme” qui vise surtout les partis et leurs chefs emporte de manière injuste les soldats courageux de l’armée vaincue. Je pense à Geoffroy, à Myard, à Poisson et à beaucoup d’autres dont la défaite traduirait surtout l’insouciance irresponsable des électeurs. Le scrutin par circonscription est aussi fait pour éviter cela.
Cette Assemblée Nationale, élue à l’aveuglette, risque donc d’offrir au président mal élu, une majorité qui lui permettra de faire ce qu’il veut, notamment par le biais des ordonnances, en n’interrogeant plus ni le peuple, ni ses représentants. La majorité sénatoriale sera bousculée, sauf peut-être en matière de réforme constitutionnelle. On ne s’apercevra que progressivement de l’existence de personnalités et de groupes ayant leurs orientations et leurs préférences, mais celles-ci ne traduiront pas le choix des électeurs qui les auront ignorées au moment du vote. Les Français de droite qui auront déposé un bulletin “en marche” jureront, mais un peu tard, qu’on ne les y prendra plus. Il n’est pas sain qu’un pareil déséquilibre dénué de clarté trouble le fonctionnement d’une démocratie. Je rappelle qu’en 1993, la majorité RPR-UDF, énorme, elle-aussi, était composée de deux partis représentés par deux groupes à l’Assemblée, et que le Président de la République était M. Mitterrand ! L’équilibre était sauvegardé.
La situation du PS s’explique par sa démagogie et son incompétence. Celle de la droite par la trahison, et d’un certain point de vue, c’est plus grave. Cette trahison a connu trois étapes. Ce fut d’abord la disparition du RPR et surtout des idées qu’il défendait. Le recentrage vers la pensée unique des gaullistes a alimenté l’électorat du Front National. Ce fut ensuite l’abandon systématique des promesses de campagne symbolisé par l’ouverture à gauche de Sarkozy, qui a rompu une confiance qui n’a pu être restaurée en 2012, et a disparu aujourd’hui. C’est enfin, de la part de gens qui ne sont pas irréprochables, moralement, le rejet du Front National au profit d’un front républicain sans fondement. Comment peut-on préférer un adepte du socialisme, voire du communisme, à un candidat patriote lorsqu’on est gaulliste ? En outre, ce veto conduit à éliminer un parti parfaitement légitime, et représentatif, de la représentation nationale. Comment peut-on accepter qu’un parti qui représente un tiers des électeurs n’ait qu’un député, moins que les communistes, pourtant en voie de disparition dans les suffrages ? La proportionnelle est le miroir aux alouettes. L’élection de députés sur des listes établies par les partis sera moins démocratique que le choix direct des citoyens, à condition que ceux-ci fassent leur devoir et s’intéressent au travail de l’élu de leur circonscription. Elle conduira au professionnalisme politique, à l’émiettement partisan et à l’instabilité des majorités. Il faut donc garder notre mode de scrutin, mais s’interdire des alliances contre-nature entre des partis que tout oppose. Le RPF du général de Gaulle avait été victime des apparentements qui avaient exclu les gaullistes et prolongé la IVe République pour le malheur du pays. C’est la raison pour laquelle je suis allé soutenir Hortense de Méreuil, Conseillère Régionale et candidate du Front National dans la 16e circonscription du Nord. Face à un de ces communistes qui ont régné sans partage dans cette région minière durant des décennies sans la préserver du déclin, à un membre d’un parti qui est le seul dans notre pays à partager l’idéologie qui a animé et anime encore des régimes totalitaires, et afin qu’un mouvement sous-représenté le soit davantage, le démocrate et le gaulliste que je suis est fier d’apporter son soutien à cette élue courageuse.
6 commentaires
Bravo M. Vanneste pour votre soutien à Mme de Méreuil! Je crains pour ma part que face au parti unique bourgeois en formation, l’ opposition populaire de droite animée par le FN le reste pour longtemps, sauf si, dans un éclair de lucidité, ce qui restera du parti LR après décomposition politique noue ENFIN des alliances avec le parti honi!
” les ambiguïtés et la confusion qui dominent les scrutins de 2017 ”
Cependant, le caractère de vote sanction des vieux partis acéphales PS et LR n’a rien d’ambigu.
Les objets de la sanction sont définis. Le bénéficiaire est trouble. Les moyens employés sont déloyaux, notamment l’absence de débat.
L’électeur de base n’est pas responsable de l’absence de débat dans les médiats ou dans les partis. Le 4 mars 2017, Daniel Dugléry tenta un long discours pour justifier son appel au retrait de Fillon ; il fut finalement interrompu brutalement par un adhérent. Une réunion pour prendre l’avis des adhérents avant d’annoncer sa décision dans la presse, ça aurait été mieux.
Le débat a maintenant lieu surtout sur facebook et twitter.
Le FN souffre de ne pas avoir assumé son engagement en faveur de la liberté d’expression face aux diktats de la correction politique ; ce faisant, il s’est laissé assimiler sans résistance aux néo-nazis.
Alain Juppé sur l’immigration en 1990 : “C’est un problème permanent et gigantesque. […] Il y a beaucoup d’écoles de ma circonscription [Paris, 18e] où 80 à 90 % des petits enfants qui sont dans les classes primaires sont d’origine étrangère et souvent assez peu francophones. Il y a aussi des problèmes d’insertion sociale, familiale, des problèmes de crèche. […] J’ai, à l’heure actuelle, dans mon arrondissement, des quartiers très chauds où la coexistence entre les communautés devient de plus en plus difficile, parce que les gens ont le sentiment que ça continue à se dégrader. Si on pouvait leur dire : Bon, maintenant, on a arrêté le flux, on va essayer de vivre en bonne intelligence…, les Français de ces quartiers, qui ne sont pas spontanément racistes, seraient tout à fait prêts à jouer le jeu avec des populations venues d’ailleurs. Mais ils ont le sentiment que ça continue et qu’ils sont totalement submergés.” (Lui)