Des électeurs étaient appelés aux urnes en Europe ces derniers jours. Les Italiens de Lombardie et de Vénétie participaient notamment à deux référendums consultatifs sur l’autonomie de leurs régions. La comparaison de ces scrutins avec le drame politique qui se joue en Catalogne est pleine d’enseignements. Le vote italien s’est déroulé dans le calme, sans grande mobilisation. La consultation de la population n’avait pas la prétention de détacher ces régions du pays par un acte de force contraire à la Constitution, mais tout simplement de permettre à une majorité d’exprimer son avis. Les Présidents des deux régions appartiennent à la Ligue du Nord, parti réputé populiste, voire xénophobe, d’extrême-droite, donc, si on écoute certains médias comme Euronews ou le Monde. Leur revendication qui consiste à cesser de contribuer de manière excessive aux dépenses de l’Etat italien au détriment des populations dont ils ont la charge est inscrite dans leur programme. Pour autant, ils n’ont pas posé la question de l’indépendance et ont organisé le vote dans le cadre de la Constitution italienne. La participation a été suffisante, 40% en Lombardie, 57% en Vénétie avec un oui massif à 95% et à 98% pour permettre aux Présidents de région d’entamer les négociations avec le gouvernement central de Rome. Ainsi donc, des “extrémistes”, d’ailleurs soutenus par la quasi-totalité des formations politiques, ont obtenu un mandat clair, au travers d’élections transparentes et démocratiques, pour entamer un processus aux objectifs limités, justifié par des arguments raisonnables. Ces deux régions riches du Nord considèrent en effet comme une spoliation le solde fiscal de 70 Milliards qui résulte de la différence entre leur contribution à l’Italie et les dépenses d’investissement de l’Etat sur leur territoire. Ils pointent d’ailleurs moins la question de la solidarité nationale que celle de la mauvaise gestion de l’Etat. Celles des régions lombarde et vénitienne sont exemplaires en matière d’endettement ou de dépense publique par habitant. Roberto Maroni à Milan et Luca Zaïa à Venise demandent donc de réduire le solde fiscal de moitié et d’obtenir une plus grande autonomie dans certains domaines comme les infrastructures ou l’éducation. En somme, les élus “d’extrême-droite” italiens ont donné une leçon en faisant appel à la démocratie directe dans un cadre strictement constitutionnel dans le but d’obtenir des réformes modérées à la suite d’un processus parfaitement démocratique.
Le mauvais élève, brouillon, irresponsable et dangereux se trouve à Barcelone, à la tête de la “Généralité” de Catalogne. Puigdemont, c’est un ludion dans les deux sens du terme, un petit récipient qui ne manque pas d’air pour combler le vide, qui monte et descend en fonction des pressions extérieures dans le bain d’agitation dont il raffole. C’est aussi un histrion, un acteur. Dans les deux cas, jouet ou homme de spectacle, c’est un activiste et non un dirigeant. Son parcours est pour le moins léger : philologue spécialiste du catalan, cela fait chic, mais ça ne donne pas forcément une grande largeur de vue. Journaliste, cela ne peut que renforcer l’idée qu’il s’agit d’un communicant fort pour les coups médiatiques plus que pour la gestion d’une collectivité. A-t-il fait ses preuves dans ce domaine ? Directeur entre 1999 et 2002 de l’Agence catalane d’information dont on devine la grande utilité et dont il avait suggéré la création, puis directeur de la maison de la culture de Gérône entre 2002 et 2004, il est élu député du parlement régional en 2006 et maire de Gérône, une ville de moins de 100 000 habitants, sans y être majoritaire depuis 2011. Sa carrière s’est faite à l’ombre de la politique. Il a toujours privilégié l’activisme politique par rapport à la bonne gestion, en faisant supporter à sa ville des frais de manifestations partisanes. L’Avocat de l’Etat l’avait mis en cause à ce sujet en 2012. Membre de la Convergence Démocratique de Catalogne qui est devenue le Parti Démocrate Catalan (Pdecat), il remplace, en 2016, Artur Mas, de la même formation, mis en cause pour détournement de fonds. Son élection n’est pas triomphale : 70 voix pour, 63 contre et deux abstentions. Aussitôt, et sans faire ses preuves, il entame le processus d’indépendance, au mépris de toutes les règles constitutionnelles espagnoles. N’ayant tenu compte d’aucune des mises en garde du gouvernement, du roi auquel il a refusé de prêter serment, de la Justice et du Tribunal Constitutionnel, le voici qui ose parler de coup d’Etat, le voici qui prétend que le gouvernement espagnol se met hors de l’Etat de Droit. Ce provocateur ne manque pas de toupet : il inverse les rôles ! Le coup d’Etat, c’est lui qui l’a tenté en ameutant la rue et en organisant un référendum anticonstitutionnel dans des conditions chaotiques avec la complicité de la police locale utilisée de manière illégale. L’Etat de droit est fondé sur la hiérarchie des normes et la séparation des pouvoirs, non sur la confusion opérée entre la démocratie et l’utilisation cynique et démagogique d’un mouvement populaire. La Constitution espagnole qui a permis le passage de la dictature franquiste à la démocratie actuelle, où les régions bénéficient d’une grande autonomie, affirme clairement l’unité indivisible de l’Espagne. Il faudrait d’abord la modifier au niveau national pour procéder à un référendum local. C’est une imposture que de prétendre faire de l’usage de l’article 155 de la Constitution, un retour à Franco. Le gouvernement va suspendre l’autonomie de la Catalogne pour sauvegarder l’Etat de droit menacé par un activiste irresponsable dont il est temps d’anéantir le pouvoir de nuisance.
Au-delà de la mauvaise foi de ce curieux “centriste” allié à l’extrême-gauche, il y a aussi chez lui un total irréalisme préjudiciable au bien commun des Catalans et des Espagnols. La Catalogne est la région la plus riche d’Espagne presque à égalité avec celle de Madrid. Elle représente par rapport à l’Espagne 20% du PIB, 30% des exportations, et 50% des activités à forte valeur ajoutée pour 16% de la population. On pourrait déjà stigmatiser l’égoïsme d’une région riche historiquement, et non en raison des politiciens qui la dirigent aujourd’hui. Mais même cette apparence demande à être corrigée. La Catalogne n’est que quatrième pour le PIB par habitant derrière Madrid, le Pays Basque et la Navarre. Surtout, elle souffre à l’évidence d’une mauvaise gestion qui fait du coup de force de Puigdemont, une opération suicidaire. C’est la troisième région la plus endettée d’Espagne derrière Valence et Castille-Manche, la première en valeur absolue avec 75,4 Milliards d’Euros. Deux des autres régions “riches” sont au contraire les moins endettées, avec 14% du PIB pour Madrid et 15% pour le Pays Basque. Cette situation classe la dette catalane en catégorie spéculative qui lui interdit de se refinancer auprès des Banques. C’est donc l’Etat espagnol qui prête ! Et en cas d’indépendance, la dette passerait de 35,2% à 115% ! Les portes de l’Europe seraient fermées, la monnaie incertaine, les relations avec l’Espagne, le principal client compromises ! Beaucoup d’entreprises sont prêtes à partir pour éviter le marasme, et certaines ont déjà délocalisé leur siège social. Puigdemont, c’est l’un des personnages de Fantasia de Walt Disney, l’Apprenti-Sorcier. Il est grand temps de lui botter le cul !
La Vénétie a été une puissance européenne, indépendante jusqu’à la fin du XVIIIe siècle et réunie à l’Italie aux deux tiers du XIXe. La Catalogne n’était qu’une province du Royaume d’Aragon et fait partie du Royaume d’Espagne depuis la fin du XVe ! La comparaison avec les “extrémistes” italiens est intéressante : qui est extrémiste ? Qui menace l’Etat de droit ? La presse française devrait être plus claire à ce sujet !
Un commentaire
Beaucoup en France pensent comme vous sans le dire aussi bien. D’anciens Etats constitués et viables aujourd’hui sont rares en Europe. Le vieux royaume d’Ecosse (->1707) et la Sérénissime (->1797) étaient des “puissances”.
Les pays catalans ne furent jamais que les premières fenêtres maritimes de la couronne d’Aragon quand ils cessèrent d’être carolingiens.
Ce qui est préoccupant (comme souvent en démocratie populaire) c’est de voir que près de la moitié des Catalans marchent à fond dans cette supercherie du déni démocratique ; mais quand on sait le bourrage de crânes scolaire depuis 1979, on peut comprendre cet aveuglement des enfants devenus adultes.