Emmanuel Macron révèle jour après jour sa véritable nature. Pur produit de notre oligarchie, si tant est que le mot “pur” puisse convenir à ceux qui nous gouvernent, il est passé directement des coulisses politico-financières, devenues le terrain de jeu préféré des énarques, au pouvoir suprême de notre pays. Jamais élu auparavant, il est devenu le Président des Français par défaut parce que le candidat légitime de la droite avait été affaibli par une campagne “miraculeusement” propice aux intérêts du candidat d'”En Marche”, et que le premier tour passé, il était entendu que Marine Le Pen, débat ou non, ne pouvait être élue. Depuis, la mise en scène présidentielle a succédé à celle du candidat. Il faut être objectif : le spectacle est bien conçu et l’artiste a, sinon du métier, du moins du talent. Il entraîne son public dans un tourbillon d’annonces, de discours, de rencontres et de déplacements, qui ne laissent plus à l’opinion le temps de réfléchir. A part quelques fausses notes qui laissent apparaître le mépris profond du personnage pour les gens du peuple qui ne sont “rien”, les discours éventuellement contradictoires si on les met bout à bout, sont ciselés à destination de chaque public, et prononcés avec un savoir-faire théâtral. Néanmoins l’enthousiasme populaire ne suit pas. Malgré la connivence empressée des médias, beaucoup de Français se rendent compte que leur situation ne s’améliore pas et que les résultats apparemment bons du pays sont le fruit d’une évolution générale plus que d’une politique nationale. Les comparaisons ne sont en revanche pas favorables. Si la France va mieux, elle demeure à la queue de l’amélioration.
Autrement dit, la réalité des faits dément le plus souvent l’apparence entretenue par une communication intensive et continue. Mais, comme disait ce cher Lénine, “les faits sont têtus”, et ils rattrapent toujours le bonimenteur le plus talentueux. Ainsi en est-il de M. Macron sur la scène internationale qui s’est plu a dresser un portrait flatteur non seulement d’égal des grands de la terre, mais de donneur de leçons suffisamment expert pour conduire les dirigeants défaillants à s’amender. Dans le faste des bâtiments royaux de Versailles et des Invalides, Poutine et Trump se trouvaient diminués. La liberté d’expression ou la lutte contre le réchauffement climatique étaient alors les vecteurs d’une leçon infligée par le maître à des élèves peu doués. L’ennui, c’est que le rideau baissé, l’on s’aperçoit que rien ne change, parce que la perspective créée par le décor était illusoire. Comme MM Poutine et Trump sont des gens polis, ils n’en tiennent pas rigueur à l’un des Européens, mais n’en tiennent bien sûr aucun compte. Cette fois, il s’agit d’un Chef d’Etat beaucoup plus rugueux que les deux autres dont le poids politique suffit. Recep Tayyip Erdogan, celui qui était venu rencontrer son “ami” Macron à Paris n’avait pas apprécié la leçon sur les droits de l’homme, mais il avait ménagé le Président en préférant s’en prendre devant lui à un journaliste de notre “service public” qui lui posait une question sur la livraison d’armes aux rebelles syriens par les Turcs. Il en avait profité pour rappeler que les Américains avaient livré énormément de matériel de guerre aux rebelles.
L’absence de conséquence positive de ces rencontres éclate au grand jour avec la Turquie, et malheureusement elle révèle ce que pèse la France de Macron. Comme ses deux prédécesseurs, celui-ci tente d’exister dans l’ombre de Washington en se voulant plus américain que l’Amérique. C’est ce que Sarkozy avait fait en Libye et Hollande failli faire en Syrie. C’est à nouveau à ce jeu que se livre Macron en Syrie, tentant de trouver ses marques dans le piège où les Occidentaux se sont eux-mêmes enfermés. La France, comme ses alliés en général, et les Américains, en particulier, comme les Turcs aussi et comme quelques Etats du Golfe, a une lourde responsabilité dans la tragédie syrienne. Au nom d’un fallacieux “droit d’ingérence”, ils ont permis et facilité la transformation d’une protestation populaire, à laquelle ils n’étaient peut-être pas étrangers, en guerre civile. Il y a en Syrie un gouvernement légal, et aucune entité ne possède la moindre légitimité pour lui être substituée. Fort du soutien de la Russie et de l’Iran, les seuls Etats qui ont le droit d’intervenir sur le sol syrien, puisqu’ils y sont à l’appel du Président Assad, le gouvernement restaure peu à peu son autorité sur l’ensemble du pays. Néanmoins, une partie du territoire est soustraite à son action par la présence active de troupes étrangères aux côtés des rebelles qu’ils arment. Cela est vrai aux frontières israélienne et jordanienne au sud, et le long de la frontière turque. Si l’on met à part la région d’Idlib où les islamistes plus ou moins radicaux sont ou ont été regroupés, les autres “rebelles” n’existent plus que par la volonté de l’étranger. C’est ainsi que la fictive “Armée Syrienne Libre” est l’outil des Américains au Sud et celui des Turcs à Afrine. C’est ainsi que les prétendues “Forces Démocratiques Syriennes” sont, au nord de l’Euphrate, des Kurdes utilisés par les Américains contre l’Etat islamique. Mais comme les Turcs considèrent les Kurdes syriens comme des complices du PKK, réputé terroriste en Turquie, on voit Ankara utiliser l’ASL pour chasser les FDS de sa frontière. Entre membres de l’Otan, et entre frères en rébellion, c’est donc la guerre, une guerre qui souligne à quel point la “coalition” apparemment construite pour lutter contre l’Etat islamique, et empêtrée dans ses contradictions, se moque éperdument du peuple syrien.
Macron faisait semblant de ne penser qu’à la Ghouta pour ignorer l’écrasement à Afrine de nos braves alliés YPG kurdes qui avaient libéré Raqqa. Hollande l’a rappelé à l’ordre. Il a donc reçu les représentants des Kurdes, et l’un d’eux, à la sortie de l’entrevue, s’est réjoui que la France soit prête à intervenir. Un démenti précipité de l’Elysée a douché nos chers alliés. Rien ne serait fait pour Afrine, mais plus à l’est, à Manbij, il y a des Américains et sans doute des Français, que les Turcs n’oseront pas bousculer. Les Kurdes auraient dû savoir que des Harkis aux Sud-vietnamiens, il n’est jamais bon d’être les supplétifs des démocraties occidentales. Erdogan est furieux qu’on fasse les yeux doux à ses terroristes. M. Macron fait penser au Maître Jacques de l’Avare jouant les intercesseurs inutiles. Les Américains songent à quitter la Syrie. Excellente nouvelle : il faut laisser les gens sérieux résoudre cette crise, et il se trouve que seule la Russie est capable de trouver un accord entre la Syrie et la Turquie pour faire en sorte qu’une autonomie relative du Rojava soit rendue militairement inoffensive pour les Turcs par la présence de l’armée syrienne à la frontière.
2 commentaires
L Amérique soutient l ASL au sud et la combat au nord de la Syrie par Kurdes interposés. …on voit là toute l’ambiguïté et l incohérence de la diplomatie américaine !
1- Macron a un ennemi qui est en lui-même : le Temps. Ce concept essentiel lui est totalement étranger et le condamne à de l’immédiat et du court terme. Bombardé à la tête de l’État par l’oligarchie, il n’a pas connu l’ascension difficile, lente, pleine d’embûches des vrais politiques. Il a été porté au pouvoir mais ne l’a pas conquis grâce à ses propres forces.
2- Sa politique n’intègre pas la durée. Il n’y a pas de pause, de maturation, de réflexion. Tout est fait à la va-vite. C’est un chanteur de variété qui sort des ‘tube » , pas un véritable artiste qui construirait une œuvre faite pour durer. Le pendant de cet aspect : c’est décousu, c’est spectaculaire, c’est facile. L’annonce d’un renforcement de notre intervention militaire en Syrie est de cet acabit.
3- Macron est insomniaque ; Poutine se couche et se lève chaque jour à la même heure. C’est peut-être insignifiant comme détail mais cette vie biologique désordonné révèle la nature de l’homme. Il n’a pas de régularité et de calme. Sa politique est également ainsi ; c’est une politique de moustique.
4- Le général lisait et écrivait des livres ayant trait à l’Histoire. Il ne pratiquait guère le communiqué et pas du tout le gazouillement. Ses actes et ses paroles résultaient de la réflexion et non de l’impulsion. Cette relative lenteur est un des éléments de la solennité de la fonction. Or, les jeunes politiciens y voient quelque chose de laborieux, ce qui est faux. On peut comprendre très vite et prendre le temps nécessaire pour décider et encore davantage de temps pour le faire savoir.