La France a été à nouveau dégradée par une agence de notation, Standard&Poors. C’est vexant. Cela affaiblit un peu plus le gouvernement. L’impact sur les taux auxquels sont soumis les emprunts français sera, cependant, faible. La perte d’un grade est moins grave que le sentiment général de dégradation qui atteint notre pays : un bâtiment qui se lézarde, tagué de partout et dont le syndic actuel n’a visiblement pas les moyens de refaire la toiture. Il a sinon épuisé les ressources des copropriétaires, du moins lassé leur bonne volonté. Le syndic précédent qui avait connu la même mésaventure se paye le luxe de donner des leçons, en attendant d’être à nouveau sollicité.
Ce spectacle navrant sinon grotesque dégrade l’image que les Français se font de leur pays. Ce n’est plus la France dégradée, mais la France défigurée, honteuse des gens qui la représentent et prétendent la conduire. La notation de l’agence est fondée sur des points précis : le chômage, l’excès de la pression fiscale ont créé une irritabilité populaire qui réduit l’action du gouvernement. Or celui-ci n’a guère de marge de manoeuvre financière. Il est condamné à tailler dans les dépenses, c’est-à-dire à créer du mécontentement. Les réformes nécessaires à la mesure des enjeux n’ont pas été entreprises. La croissance ne reviendra au-dessus de 1,5% du PIB qu’au mieux en 2015. C’est le seuil minimum pour créer de vrais emplois. En face de cette réalité consternante, notre microcosme politique s’agite comme les poules d’une basse-cour : ils ont simplement inversé les rôles. La gauche se livre à un dégradé de critiques à l’encontre de l’agence : cela va de l’accusation de collusion capitaliste et américaine chez les rouges vifs à la remise en cause de son sérieux technique chez les roses pâles, en passant par le catégorique “manque de crédibilité” du péremptoire Montebourg dont on mesure à chaque instant la compétence économique et la propension à dire des choses exactes. Pendant ce temps, médusés, les Français assistent au passage, en Bretagne et à Marseille, en avance sur la date et en retard sur les problèmes, du Père Noël socialiste, avec dans sa hotte les milliards qu’il n’a pas et qu’en plus il vient de leur piquer. L’opposition, qui manque de talent, mais pas de culot, ose parler des réformes que l’exécutif ne lance pas, comme si durant ses dix ans de pouvoir, elle en avait eu le courage. Enfin, pour couronner le tout, le Président effectue une retraite stratégique dans l’histoire, avec l’intention de recréer l’union sacrée. La comparaison entre la Grande Guerre et la situation économique actuelle est inconvenante et stupide. Chacun sait que les crises et les guerres ont rigoureusement des effets inverses sur la cohésion sociale.
La réalité est cruelle. Les pays du Nord de l’Europe ont, comme l’Allemagne procédé aux réformes structurelles sur les retraites, le marché de l’emploi et le coût du travail avant la crise. Leur effort se porte donc uniquement sur le retour à l’équilibre des comptes. Parce que les Allemands ont accepté une politique dure qui en a appauvri certains, les excédents commerciaux et budgétaires ainsi que le faible taux de chômage sont pour eux la rançon du courage. Les cigales du sud, de la France à la Grèce, doivent réaliser en même temps les réformes structurelles et le rétablissement des comptes. Elles n’ont pas effectué les premières par facilité, à l’abri des taux d’emprunt offerts par le bouclier de l’Euro. Lorsqu’il est apparu que celui-ci était en carton, sans véritable transfert, sans solidarité automatique entre des économies disparates, sans gouvernance commune, les marchés ont fait le tri. Celui-ci n’est pas trop défavorable à notre pays. Mais comme nos voisins du sud, avec un peu moins de contraintes, il nous faut affronter le double choc des réformes et de l’assainissement des comptes. Lorsqu’on compare le pilotage allemand au nôtre, le verdict est sans appel. L’Euro a été une excellente affaire pour l’Allemagne et une calamité pour notre industrie. Avec une monnaie plus faible que le Mark, et une industrie déjà performante, plus compétitive encore après les réformes, protégée des dévaluations de ses concurrents européens, l’Allemagne est le seul grand pays à gagner au système. Il est assez clair que des pays comme la France, l’Italie, et même l’Espagne, qui, malgré ses efforts, n’est pas sortie de son auberge, devraient vouloir en changer. L’offre politique, l’alternance semblent exclure pareille révolution. Elle deviendra sans doute la seule solution. En ce 9 Novembre où l’on commémore la disparition du Général de Gaulle, l’idée d’une libération et d’une renaissance doit nous inspirer.
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