“Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire, arrivent aisément”. La célèbre formule de Boileau résume ce qui fut le sommet de la pensée et de la civilisation françaises, le classicisme. Il n’y a rien d’étonnant à ce que la confusion la plus totale règne dans les discours de notre époque alors que la France poursuit un déclin qui semble irréversible. Nous avançons dans une sorte de purée de pois idéologique où plus rien n’est clair ni distinct. Certes, ce brouillard intellectuel est en grande partie importé et contraire à nos habitudes mentales, mais peu à peu il s’installe au fur et à mesure que l’on s’habitue à parler anglais et à ne plus penser en bons Français cartésiens.
C’est ainsi qu’en politique étrangère, nous nous appliquons à suivre fidèlement les méandres de la politique menée par la baudruche médiatique de Washington. Celle-ci vient de déclarer qu’elle ferait la guerre tout en ne la faisant pas, avec des frappes aériennes, mais sans troupe au sol, comme en Somalie ou au Yémen où ça dure depuis des années. Contre qui, cette guerre ? Contre un Etat islamique, qui n’est ni un Etat ni islamique selon l’éminent et néanmoins prématuré Prix Nobel de la Paix. Un pouvoir qui s’étend sur deux pays et contrôle la seconde ville de l’un d’eux n’est pas un Etat. Une religion fondée par un chef de guerre et qui durant toute son histoire a connu des appels à la violence conformes à son texte fondateur, même si elle ne peut être réduite à cela, ne produit pas le fanatisme par hasard, mais il ne serait pas correct de le dire. Tout cela pour faire passer l’idée qu’on reste allié aux riches sunnites du Golfe et qu’on continue à faire la guerre à la Russie et à ses amis syrien ou iranien. Non seulement la politique calamiteuse d’Obama en Syrie nous a entraînés dans cette chienlit, mais il persiste !
L’Europe offre la même confusion. Tandis que certains pays menacent d’éclater, certains politiciens rêvent toujours d’une Europe Fédérale. Peut-être même ces derniers se frottent-ils les mains en entrevoyant une Europe des Régions ? Mais cette brume intellectuelle propre aux technocrates bruxellois leur cache le réveil des Peuples. Il est quand même extraordinaire de voir qui présidera la Commission. Jean-Claude Juncker vient d’être désavoué par les électeurs de son pays, et aussitôt il devient l’un des responsables principaux de l’Union Européenne. Quant à son pays, c’est l’un des plus petits. Ce n’est pas une Nation, mais une province érigée en pseudo-Etat, incapable de défendre son indépendance, parce que cela correspondait au compromis des puissances, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni au moment de sa création. Son insolente richesse, l’un des PIB par habitant les plus élevés du monde est liée à sa situation exceptionnelle de paradis fiscal. Il est vrai qu’il est toujours plus facile d’avoir des impôts moins lourds lorsqu’on compte sur les autres pour qu’ils vous défendent. C’est donc Monsieur Juncker qui va demander à l’un de ses commissaires, Monsieur Moscovici, “notre” commissaire, chargé de l’économie sans doute en raison de ses résultats mirobolants en France, de rappeler à l’ordre la France qui n’en finit pas d’échouer dans ses tentatives de redressement. A quand l’Europe présidée par le Prince de Monaco ?
La politique française est dans le coton. Dans notre curieuse démocratie où les élus ont peur de leurs électeurs, le détour est devenue la règle. Sarkozy élu à droite avait aussitôt ouvert à gauche et perdu un temps précieux avant la crise en augmentant les dépenses quand il fallait les réduire. De même, ce grand cachottier de Hollande a mis deux ans pour avouer qu’il n’était pas socialiste, mais social-démocrate voire social-libéral, comme si cette chimère était possible. Deux ans perdus de plus, et une dette qui augmente avec des taux attractifs, c’est vrai, mais qui seraient rassurants si l’on continuait à distinguer l’investissement pour l’avenir qu’il faudrait faire et qu’on n’a plus les moyens de réaliser et le fonctionnement actuel que l’on finance sur le dos des générations futures, le muscle et la graisse, pour utiliser des images crues. Une nouvelle fois, la France annonce qu’elle ne respectera pas ses engagements. Notre déficit devait être de 3% en 2014. Finalement, il dépassera 4% et ce sera de même l’année prochaine. Que sont devenus les impôts supplémentaires ? Où sont passées les diminutions de dépenses qui n’étaient d’ailleurs que des réductions d’augmentation ? Mystère ! C’est la faute à la déflation et à l’Allemagne ! L’absence de compétitivité française n’y est pour rien !
Mais c’est notre Justice qui a battu cette semaine tous les records en matière de confusion. Un groupe de femmes hystériques se livrent à une provocation obscène dans l’enceinte de Notre-Dame. Elles le font au nom de la laïcité et contre le fanatisme, comme si la laïcité n’était pas le respect des religions et la neutralité à leur égard, et comme si Notre-Dame était connue pour ses prédications obscurantistes. Les agents de sécurité expulsent celles qui manifestement troublent l’ordre public et contreviennent à la destination du lieu. Ce sont bien-sûr les dits-agents qui sont condamnés. Il faut avouer que, même avec une tête solide, être obligé sans cesse de marcher dessus, ça finit par faire mal !
2 commentaires
Votre analyse est juste et désespérante malheureusement. Crise économique et crise morale se font la courte échelle. Nous n’avons plus d’argent sauf à emprunter et nous le faisons de plus en plus. Pour quel résultat ? Moins de croissance depuis un an ( à 0,1% fin juin 2014) que la moyenne des pays de la zone euro et de l’UE, un chômage record. Même en politique extérieure nous perdons ce que l’histoire nous a légué, la possibilité d’être un interlocuteur valable, écouté car indépendant. Il est temps pour les français de renverser la table sur laquelle se nourrisse et se gave les incapables… que nous avons élus. Car tout est à refaire, même le régime montre ses limites avec un Président, devenu normal, dans une fonction présidentielle qu’il dénature comme l’avait commencé son prédécesseur.