On mesure l’inutilité, voire la nocivité de certaines autorités administratives indépendantes que le Législateur a cru devoir instituer dans un moment d’égarement lorsqu’on prend connaissance des propos déplacés et irresponsables de Mme Adeline Hazan, contrôleur général des Lieux de privation de liberté. Celui-ci doit contrôler les conditions de l’enfermement au regard de la loi. Il n’a aucune légitimité pour juger la politique pénitentiaire décidée par les élus. Sur le fond, Madame Hazan travestit son a priori idéologique hostile aux prisons en parlant d’inflation et en tentant de montrer que plus on construit de prisons, plus on a tendance à enfermer. Si on suit la logique de son raisonnement, la création de prisons entraînerait plus de décisions d’incarcération, des jugements plus sévères, comme l’abondance de monnaie fait monter les prix. Evidemment, le corollaire montre l’absurdité du discours : si on diminue le nombre des cellules, il y aura moins de détenus, et des peines plus douces. Y aura-t-il moins d’infractions ? Dans les deux cas, le socle de la réflexion est en effet oublié : le nombre des détenus ne dépend pas de la place qui leur est offerte, mais des délits et des crimes qui sont commis. Le fait de diminuer les possibilités d’emprisonnement n’a aucun effet sur la réduction de la délinquance, mais sans doute une conséquence néfaste sur son augmentation, en raison du sentiment d’impunité qu’il engendre. L’inflation est produite par un excès de monnaie par rapport aux richesses. ” l’inflation carcérale”, c’est-à-dire la surpopulation des prisons, cette tarte-à-la-crème des journalistes en mal de copie, tient au contraire à l’insuffisance des lieux de détention par rapport aux besoins de notre société. Le contre-sens idéologique qui nie cette évidence consiste à isoler l’enfermement de l’ensemble de la chaîne pénale. La prison est regardée pour elle-même. Les condamnés dont on oublie volontiers les causes de leur détention deviennent les victimes d’un système qui les maltraite. On souhaite donc limiter l’entrée et faciliter la sortie. On insiste sur le caractère criminogène du système pénitentiaire, sur les suicides, sur les défaillances, comme l’usage de la drogue ou la radicalisation. On gomme les actes qui ont conduit à la sanction, et davantage encore leurs victimes.
Notre Justice fonctionne très mal en raison de deux travers majeurs. Le premier est l’absence de moyens. Ce domaine par essence “régalien” de l’Etat, qui devrait être avec la sécurité extérieure et intérieure une priorité absolue, est délaissé depuis des décennies au profit de l’obésité de l’Etat maternant, redistributeur, et généreux avec les copains et les coquins. Les annonces préélectorales de dépenses nouvelles de l’exécutif, dont le train de vie ne régresse pas, en témoignent abondamment. Le budget de la Justice de la France est l’un des plus faibles en Europe. Il explique la lenteur, le retard, le conditionnement des décisions par les moyens, la gestion hôtelière des prisons, leur insuffisance et leur état. La seconde cause du désastre judiciaire de notre pays est comme toujours le poids de l’idéologie gauchiste dans la formation de ses cadres. La déconstruction de la justice pénale par Foucault fait encore des ravages. Les sciences humaines ont envahi les prétoires pour transformer le délinquant en malade social, victime de l’injustice de notre société, du racisme et de l’exclusion, dont il faut assurer la réinsertion plutôt que la punition, quand il ne s’agit pas de lui éviter la privation de liberté, au regard de sa bonne volonté et de ses capacités. Parce qu’on manque de place, que les prisons fonctionnent mal, et qu’on veut la rédemption du condamné plutôt que sa radicalisation, on se rue sur les autres solutions : de Dati à Taubira, même combat !
Mme Hazan, oubliant sans doute qu’elle est à la tête d’une autorité “indépendante” condamne la proposition de l’opposition de créer de nouvelles places dans les prisons, et se fait la propagandiste de Mme Taubira, qui privilégiait les peines de substitution, mais dont la loi ne serait pas suffisamment appliquée. On se souvient que celle-ci visait à éviter l’enfermement pour les condamnés à moins de cinq ans. Rachida Dati, car l’opposition au pouvoir oublie ses promesses, s’était contentée de le proscrire pour les moins de deux ans. On subit donc à nouveau la louange des alternatives à la détention : l’aménagement des peines, la liberté sous contrainte, le bracelet électronique, celui que l’assassin du Père Hamel portait au moment de son crime ! Et Mme Hazan pousse son aveuglement jusqu’à prôner un numerus clausus de l’emprisonnement. Quand c’est plein, on ne punit plus ! Ce n’est pas le crime qui décide de la sanction, mais la place ! L’essentiel est que les droits du condamné soient respectés, sa dignité, son confort et qu’on évite ainsi les tensions entre surveillés et surveillants… Par ailleurs, bien sûr aussi certains proposent de décriminaliser certaines formes de délinquance, celles liées à la drogue, par exemple.
L’aberration atteint son paroxysme lorsque Mme Hazan évoque, pleine de sollicitude, le “droit au travail” des condamnés qui ne serait pas respecté. Le travail ne devrait pas être un droit, mais un devoir, une obligation triplement réparatrice, pour financer l’hébergement, indemniser les victimes et préparer la sortie et la réinsertion. Quand, malgré la demande de Mme Alliot-Marie, qui avait succédé à Madame Dati, j’ai refusé de voter la loi qu’elle présentait, j’avais obtenu de faire un rapport sur les travaux d’intérêt général. Le travail devrait être le support principal de la peine, non la privation de liberté. Pour les condamnations à moins de six mois, il doit remplacer l’enfermement, ce qui permettrait par exemple de nettoyer les tags qui envahissent nos villes. Au-delà il doit accompagner obligatoirement la détention. Actuellement, il est un droit soumis au bon vouloir du condamné ! Cette véritable révolution exigerait bien sûr une revalorisation du personnel pénitentiaire, de sa formation comme de sa rémunération. Singapour offre un modèle à suivre. J’ai participé avec René Dosière à la rédaction d’un autre rapport, sur les Autorités Administratives Indépendantes. Nous y préconisions l’absorption du “contrôleur des lieux de privation de liberté” par le Défenseur des droits. Cette mesure n’a pas été retenue, malheureusement.
8 commentaires
Un comparatif intéressant avec les politiques pénales et carcérales d’autres pays Européens qui reprend la plupart des points que vous énumérez.
http://www.atlantico.fr/decryptage/population-carcerale-mais-quel-est-secret-pays-nord-europe-magnus-falkehed-alexandre-giuglaris-900092.html
Je ne peux m’empêcher de penser q’une politique volontariste d’insertion basée sur obligations et devoirs aurait dû être menée depuis longtemps en direction des jeunes désœuvrés, du décrocheur scolaire au pré-délinquant.
Cette dame vient d’inventer l’hôtellerie pénitentiaire. Les directeurs de centrales et de maisons d’arrêt devraient poser une affichette « COMPLET » sur la porte de leur établissement lorsqu’il n’ y a plus de place.
On pourrait aussi demander aux procureurs et aux juges d’instruction de demander des réservations au cas où leur viendrait la méchante idée d’écrouer un individu. Ce pouvoir sombre dans le burlesque et me confirme l’imbécillité de ses représentants et de ses courtisans.
La Justice est dans le même état que le reste des institutions. En quelques années, les magistrats ont ruiné le prestige de l’institution et par là même le respect que l’on avait pour eux. Ils ont rejoint les politiques et les journalistes dans le marigot de la république agonisante. Cela me fait de la peine pour eux.
Dans le même bain, ces juges osent même se rebeller contre l’exécutif dans l’affaire Sauvage et mêlent ainsi leur incurie à l’incurie présidentielle en jetant dans le ruisseau la grâce présidentielle.
Dans une société qui se décompose, plus rien, ni personne n’est respecté ; certains tentent de sauver la face et les apparences mais on sent bien le caractère inéluctable de l’effondrement. C’est sans doute aussi pour cette raison que les islamistes ont choisi la France pour cible.
Ribus, excellent comme le papier de Christian Vanneste!
Intéressant ce que vous dites Ribus lorsque l’on sait que 60% des juges sont des femmes, 80% des magistrates aussi ; que l’éducation nationale est féminisée à 80% et que le socio-éducatif comme le secteur de la santé mentale sont entre leurs mains.
Le pape ne cesse de dénoncer “le maternalisme” de nos sociétés Occidentales, cette glu castratrice et sclérosante. Il n’est pas fou cet homme, il sait de quoi il parle pour avoir placé la vierge Marie en tête de gondole de ce supermarché de la foi qu’est le Christianisme…
Intéressant ce que vous dites Ribus lorsque l’on sait que 60% des juges sont des femmes, 80% des magistrates aussi ; que l’éducation nationale est féminisée à 80% et que le socio-éducatif comme le secteur de la santé mentale sont entre leurs mains.
Le pape ne cesse de dénoncer “le maternalisme” de nos sociétés Occidentales, cette glu castratrice et sclérosante. Il n’est pas fou cet homme, il sait de quoi il parle pour avoir placé la vierge Marie en tête de gondole de ce supermarché de la foi qu’est le Christianisme…
“supermarché de la Foi qu’est le christianisme”? pouvez-vous expliquer? Le Christianisme quand on le connait est, notamment, un ensemble de valeurs extrêmement cohérent; alors je ne vous comprend pas.
Le Christianisme est, au moyen de notre « Sainte mère l’église », une institution matrile. C’est d’abord et avant tout une création humaine ; un organe de pouvoir tributaire d’une doxa (état d’esprit déterminant un législatif). Sans femmes point d’église et ce depuis longtemps.
Prenez un exemple simple. Le Christ n’a cessé de condamner cette institution qu’est la famille (Mathieu, Luc, Jean) alors que c’est le fonds de commerce de l’église repris sans nuance par les tenants de la Manif pour tous. Le message du Christ était cohérent (Eloignez-vous des membres de votre famille biologique – exogamie) celui de l’église repose essentiellement en la matière sur une endogamie de besoin (Un papa + une maman = on ne ment pas aux enfants). Lorsque l’on sait ce qu’est la “Sainte famille) ; Jésus fruit d’une PMA divine et produit d’une GPA céleste éduqué par un ppère adoptif….
Je n’aimerais pas être à la place de cardinaux partagés entre leur besoin de maintenir leur boutique la tête hors de l’eau, donc obligés d’adopter par nécessité temporelle un positionnement en « légère » contradiction avec le message du Christ.
Et si on demandait à la Cour des Comptes de faire un bilan chiffré de ce que coûtent toutes les danseuses de la République :
-les avantages et privilèges effarants dont bénéficie les ex-présidents et ex-ministres
-les logements de fonctions indus etc…
-tous ces comités et commission onéreux qui ne servent qu’à caser les copains et les coquins
– les élus pléthoriques à l’Assemblée, au Sénat etc…nous n’avons pas besoin de plus de lois, nous avons besoin d’un ensemble de lois cohérent (dont on élimine les archaïsmes, les doublons…) il faut “nettoyer” les codes pas les alourdir… et surtout éviter les lois idéologiques destructrices, avatars de Mai 68, qui défigurent l’humanité..
-les financements excessifs de l’administration de la France et de l’Europe; en revenant au principe de subsidiarité, et aux pouvoirs régaliens on pourrait éliminer la moitié des fonctionnaires, et leur coûts
– en “nettoyant” les subventions des idéologies, en fonction de leur utilité réelle pour l’ensemble des citoyens…
On trouverait sûrement de quoi financer intelligemment la Justice. mais serait-ce suffisant? Le “mur des cons” a de quoi inquiéter! une justice idéologique est la pire des justices…
et même de quoi combler en partie la dette abyssale de la France !
Quel candidat Président aura ce courage ?
Les médias lui permettront-ils d’accéder à la magistrature suprême, quand on sait que 70 % des journalistes votent à gauche ?