La primaire de gauche offre une fausse symétrie avec celle de droite. Certes, on peut voir en Valls l’équivalent de Sarkozy. L’ancien Ministre de l’Intérieur, devenu Premier Ministre et candidat à la place du Président sortant, possède une personnalité aussi tranchée que celle de l’ancien Ministre de l’Intérieur, devenu Président en débordant Chirac. En 2017, l’un et l’autre auraient pu être les candidats naturels de leur parti. Mais en laissant le souvenir d’un pouvoir exécutif contestable et contesté, ils sont devenus les cibles des tirs de tous leurs concurrents au sein des primaires. Là s’arrête la comparaison. François Fillon sera le candidat de la droite puisque Sarkozy a été éliminé au premier tour. Valls, s’il s’impose au second tour de la primaire, ne se retrouvera pas seulement avec un concurrent à sa gauche, Jean-Luc Mélenchon, mais aussi avec le champion de l’ère du vide, Emmanuel Macron, idole des gogos et virtuose des slogans dénués de fond. L’absence de vision claire d’une France qu’il s’agit de changer, c’est-à-dire de diluer, de gommer dans l’Europe et dans la mondialisation, devrait inquiéter. La construction artificielle d’un personnage médiatique aux contours flous, dont le sourire est un masque, devrait éveiller la suspicion. Si le vote hors-sol annoncé par les sondages en faveur de ce dernier se vérifie, il est probable que le candidat issu de la primaire de gauche soit absent du duel final. C’est ce qui fait des débats télévisés une bataille des sept nains que les journalistes traitent avec beaucoup de condescendance, le sourire en coin. Les chances d’une victoire poussent au réalisme. Une fois intégrée la quasi-certitude de la défaite, l’enjeu n’est plus le même. Les candidats peuvent donner libre cours à leurs thèmes préférés sans le moindre égard pour la faisabilité des mesures proposées. Manuel Valls, qui a été confronté à la réalité du pouvoir, est le seul à échapper à cette fuite en avant. Il doit sans cesse défendre un bilan décevant en affirmant qu’on ne peut pas tout faire. Il avait cependant tenté d’échapper maladroitement à ce rôle en reniant le 49/3 et en promettant de ne plus pécher. Promesse d’ivrogne évidemment puisque cet article fait partie du système de la Ve République qui privilégie l’exécutif par rapport au législatif !
Alors, chacun des autres y va de sa petite musique. Il y a les idéologues. Dans ce registre, Hamon emporte la palme. Comme Rousseau, Hamon commence par écarter les faits. Depuis longtemps, l’immigration a dépassé les possibilités d’assimilation du pays. Ni la conjoncture économique, ni le contexte social n’appellent de nouveaux migrants qui n’auront pas de travail, accentueront nos déficits sociaux, et qu’on le veuille ou non, aggraveront les questions sensibles des ghettos urbains, de la délinquance, voire du terrorisme. L’incursion d’une trentaine de barbares à Juvisy/orge, contre lesquels la police n’est intervenue qu’après une heure et demie de saccage, et qui ont été laissés en liberté par la “Justice”, rappelle une fois de plus, après Viry-Chatillon, que la République ne fait plus la loi sur tout le territoire. Mais M. Hamon, imperturbable, récite sa leçon : la France mythique des “droits de l’homme” (qu’elle est incapable de faire respecter pour ses propres ressortissants) doit accueillir plus de migrants. Elle doit même aller les chercher ! Quand on l’interroge sur le nombre des “visas humanitaires” distribués pour ce faire, il répond que ce doit être à la hauteur de nos “valeurs”. Peu importent les moyens, le coût et encore moins l’intérêt national ! Les socialistes sont les hérétiques du réel : plus la réalité dément leurs illusions, plus ils s’y accrochent. Hamon est hérétique et relaps. Non content de s’être toujours trompé, il persévère dans l’erreur. La France souffre à l’évidence d’une dépense publique excessive, d’une propension à préférer l’assistance et la redistribution au travail, à l’initiative et à la responsabilité. Là encore, il faudrait donc aller plus loin, dépenser davantage sans produire plus, instaurer un revenu universel dénué d’obligation. Le progrès des “progressistes”consiste toujours non seulement à constater et à accepter une dérive, mais à l’accentuer. Ainsi, Benoît Hamon constate la consommation du cannabis, sa croissance. Il en déduit que la répression ne sert à rien et en tire la conclusion qu’il faut tolérer et informer. Il lui échappe totalement que l’aval donné à cette addiction est un signal détestable alors qu’on lutte contre le tabagisme, et ses ravages sur la santé, et que les réseaux qui vivent de ce trafic, se déplaceront tout simplement sur des produits plus dangereux qui demeureront interdits. Il est vrai que l’ouverture de “Salles de shot” en dit long sur la sympathie complice de la gauche à l’égard des transgressions.
L’autre idéologue, c’est Peillon. Après l’illuminé, le sentencieux, donneur de leçons. Campé sur ses certitudes, l’ancien Ministre de l’Education Nationale, est aussi favorable à la légalisation du cannabis et hostile à la répression. Il propose donc une solution miracle (un comble pour un athée militant) : un grand débat national sur la question ! Comment n’y avait-on pas pensé plus tôt ? En politique internationale, il se fait juge souverain, dénonce l’agressivité de Poutine, les 350 000 victimes assassinées par Assad, l’annexion de la Crimée. Peillon, c’est le revenant de la gauche. Son laïcisme militant, profondément anticatholique ramène au début du XXe siècle et au petit père Combes. Fervent défenseur du partenariat transatlantique, il fait resurgir la SFIO de la guerre froide, celle qui pensait que les communistes n’étaient pas à gauche, mais à l’est. Pour le reste, en bon socialiste de tous les temps, il pense que l’éducation est une question de moyens, et qu’elle a pour priorité les maîtres qu’il faut former (ou déformer ?) plutôt que les élèves. Il annonce un bouclier fiscal en confondant bouclier et massue, puisqu’il s’agit de limiter les taxes en fonction du revenu, comme si les prétendus riches, c’est-à-dire, pour la plupart, des moins pauvres devaient, quelque soit leur travail, sans arrêt transférer leur revenu sur tout, leur habitation, leur voiture, à d’autres. Encore plus de seuils créant des injustices criantes ! Encore moins de motivations pour le travail et l’investissement ! Si on continue à vouloir faire payer aux plus riches et aux plus dynamiques l’air qu’ils respirent, ils seront de plus en plus nombreux à aller le respirer ailleurs. Le succès éclatant du Crédit Impôt Recherche prouve pourtant que l’incitation fiscale vaut mieux que le matraquage au bout duquel la justice apparente conduit surtout à l’appauvrissement du pays.