Dans une effroyable synthèse, le Hamas, l’organisation terroriste islamiste qui tient la bande de Gaza a frappé Israël. Comme pour le 11/9 aux Etats-Unis, le renseignement réputé le meilleur du monde n’a rien vu venir, la sécurité n’a rien empêché, et l’armée manifestement occupée en Cisjordanie est arrivée trop tard. Comme lors de la guerre du Kippour en 1973, l’effet de surprise a joué alors que la population israélienne célébrait le Sim’hat Torah après la Fête des Tentes, respectait le Shabbat et même faisait parfois la fête, la tête ailleurs. Comme le 13 novembre 2015 à Paris, au Bataclan, la lâcheté indissociable du terrorisme a massacré sans retenue les participants à une “rave party”, à deux pas de Gaza, plongeant dans l’horreur des festivaliers désarmés.
Cette triple résonance historique ne révèle que trop la tendance à l’oubli qui l’emporte plus que jamais dans notre société post démocratique. Dans le tourbillon quotidien de la désinformation, l’horizon de l’histoire s’est effacé : un événement chasse l’autre, une émotion suscitée laisse place à la suivante. Alors que la difficile victoire du Kippour vient d’être commémorée à l’occasion de son cinquantième anniversaire, Israël a manifestement baissé la garde, davantage préoccupé par les fractures politiques internes que par une menace pourtant si voisine. Plus profondément, on peut s’inquiéter du changement qui s’est opéré au sein de cette nation exceptionnelle : les Israéliens actuels ne sont plus les pionniers courageux, les kibboutzins solidaires, les rescapés des camps de la mort nazis exaltés par le film Exodus. Dans un îlot de prospérité généré par une économie d’avant-garde, ils ont bâti une protection de plus en plus fondée sur les machines, et donc de moins en moins sur les hommes. Si certains présentent positivement ce pays comme un bastion avancé de l’Occident, on peut craindre qu’il ne soit contaminé par les maux qui minent la civilisation “judéo-chrétienne” décadente : individualisme hédoniste qu’illustre la tragique “rave party”, communautarisme qui déchire le tissu social entre Tel Aviv la tolérante avec ses “gay pride” et Jérusalem la triplement religieuse, fractionnisme politique favorisé par les scrutins proportionnels. La manière dont Israël se sortira de ce nouveau piège du destin auquel le peuple juif est confronté sera une leçon pour nous.
Est-il encore le “peuple sûr de lui et dominateur” dont parlait le général de Gaulle ? Il est plutôt écartelé entre trois images de lui-même : le pogrom infligé par le Hamas, la tuerie systématique, l’enlèvement et la déportation des otages, l’humiliation des vivants et des morts traités comme des choses réveillent le souvenir du peuple martyr sans cesse condamné à l’errance d’une persécution à l’autre et que le Hamas voudrait jeter à la mer ; l’endurance affermie si longtemps par les sévices et les menaces a permis qu’au lendemain de la dernière épreuve, la Shoah qui pouvait mettre fin à son existence, Israël rebâtisse un Etat juif suffisamment fort pour protéger son peuple et qu’il le fasse sur la terre promise et plusieurs fois perdue ; mariant d’une manière unique l’identité d’une religion maintenue malgré les déplacements, les séparations et les oppressions avec la souplesse d’une intelligence nourrie par la connaissance de l’autre, le peuple juif en restant distinct a joué un rôle sans rapport avec son nombre dans l’histoire et notamment dans la culture occidentale.
Face au peuple martyr qui peut devenir le glaive de David comme il a été un des phares de l’humanité, qui est l’ennemi ? Hier, c’était le nationalisme arabe. Aujourd’hui c’est l’islamisme, et sa métastase islamogauchiste en Occident. On est frappé de voir se développer en France un discours idéologique stéréotypé charriant des concepts préfabriqués pour justifier la sauvagerie du Hamas. Selon un procédé devenu habituel, le coupable devient la victime, sa bestialité est la rage de celui qu’on a privé d’humanité et qui en souffre au point de ressentir un besoin de vengeance sans limite. Ainsi, la razzia commise par les Gazaouis ne serait pas le vieux comportement des peuples des sables inscrit comme une règle sacrée dans le coran, non ce serait la soif de revanche des colonisés contre leurs colons. Cette traduction de la haine islamiste en justice décoloniale est le vecteur pour toucher la gauche occidentale. Elle doit convertir le terrorisme barbare en lutte légitime contre l’apartheid, la violence structurelle de l’occupant et son racisme systémique. Les Juifs en Palestine sont des colons qui ont chassé les pacifiques Palestiniens de leurs maisons et de leurs terres, et les tiennent enfermés dans leurs réserves de Cisjordanie et de Gaza, on n’ose pas dire dans leurs ghettos. C’est cette lecture qui séduit les marxistes non repentis, indécrottables qui sévissent à LFI, au NPA, chez les Indigènes de la République, là où perce la volonté de transplanter en France ce qui se passe en Israël, et se passe en fait déjà dans les quartiers perdus de la République. Il y a des Français qui ont fait leur Alya pour échapper au sort de Mireille Knoll, de Sarah Halimi, entre autres, et qui ont été assassinés par le Hamas, samedi dernier.
La France connaît donc cet ennemi et depuis quelques jours peut identifier ses collaborateurs, le parti de l’étranger, comme disait le général de Gaulle, le parti de l’ennemi, le parti des traîtres. Gaza n’est pas un Etat, mais le repère de terroristes dénués de la moindre légitimité. Sa sanglante incursion en Israël relève de l’attentat terroriste, non du crime de guerre. Le droit international invoqué pour en interdire le siège n’est que le discours creux des belles âmes qui ont les mains blanches parce qu’elles n’ont pas de mains, comme disait Péguy. Tel l’Etat islamique, le Hamas doit être détruit par tous les moyens. Mais cette opération qui demandera d’amples sacrifices ne suffira pas. Il faudra ensuite s’interroger sur les fautes commises, non celles de l’Etat d’Israël, mais celles de l’Occident, de la diplomatie américaine en particulier, si nous voulons à nouveau maîtriser le destin de notre civilisation et celui de notre pays en particulier. (à suivre)
2 commentaires
Tout à fait d’accord, le député LR Habib disait cette semaine très justement qu’il y a une différence abyssale entre les civilisations arabo-musulmane et judéo-chrétienne: la première sacralise la mort alors que la deuxième sacralise la vie…Le choc de civilisation est alors inévitable. Il n’ y a que les bisounours humanitaros gauchos qui ne le comprennent pas, pensant que “tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil” comme le disait Jean Yanne.
Erwan, excellent !
Comme bien sûr le papier de Christian Vanneste