M. Christian Vanneste attire l’attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la politique que le Gouvernement compte engager au sujet du droit d’auteur. Il souhaiterait connaître ses intentions en matière de copie privée, de réponse graduée ou encore de licence globale.
Réponse du Gouvernement :
La création culturelle vit un tournant majeur avec le développement des technologies numériques et de l’Internet à haut débit. Cette révolution est évidemment riche de possibilités, grâce aux nouveaux services en ligne, mais aussi de risques importants, liés à la contrefaçon numérique. Sans la rémunération à laquelle les créateurs ont droit, la création elle-même est menacée. Un grand nombre d’internautes qui téléchargent gratuitement des oeuvres sur les réseaux n’ont pas réellement conscience d’être dans l’illégalité ni de causer du tort aux créateurs, d’autres éprouvent un sentiment d’impunité. Face à ce problème complexe, la loi du 1er août 2006 relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information a écarté le mécanisme de licence globale qui aurait consisté à légaliser les échanges sur les réseaux de pair à pair, en contrepartie d’une rémunération forfaitaire versée par les fournisseurs d’accès à Internet. La loi repose sur le postulat suivant lequel chaque internaute doit être pleinement conscient et responsable de ses actes et la petite minorité de ceux qui sont à l’origine des systèmes de piratage doivent être clairement dissuadés et empêchés d’agir. La loi du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet rejette également le mécanisme de licence globale, qui n’est pas conciliable, sur le plan juridique, avec les engagements internationaux de la France. En effet, la mise en oeuvre de la licence globale parvient à des solutions très proches de celles des « licences obligatoires », qui sont encadrées par les conventions internationales et les directives européennes sur le droit d’auteur et elle devrait donc répondre aux conditions d’admissibilité prévues par ces dernières, ce qui ne paraît pas être le cas. Ensuite et surtout, une multitude de modèles économiques sont en train de se développer sur le mode contractuel – y compris la gratuité pour l’internaute financée par la publicité, ou encore l’abonnement forfaitaire mensuel, proposé notamment par les fournisseurs d’accès à Internet ou par certaines plates-formes de téléchargement, en liaison avec les industries culturelles. La licence globale conduirait en revanche à décourager les efforts d’adaptation de la filière à la nouvelle donne, et en particulier l’amélioration qualitative et quantitative de l’offre légale : la rémunération ne serait plus liée aux stratégies de contenus de chacun des acteurs (prises de risque pour financer de nouveaux artistes) mais au nombre d’abonnés des fournisseurs d’accès à Internet. Si la licence globale a le mérite d’une simplicité apparente, elle constitue une réponse de résignation au piratage. La solution repose bien plutôt sur le dynamisme des stratégies commerciales conjuguées des opérateurs sur Internet et des industries culturelles. La loi du 12 juin 2009 ne repose pas pour autant sur une approche répressive de la lutte contre la contrefaçon sur les réseaux, mais bien au contraire sur une approche préventive. Alors que l’internaute s’exposait jusqu’à présent à une poursuite pénale au premier téléchargement illégal, sans qu’il soit possible de l’informer des risques encourus, la lutte sera désormais essentiellement préventive, puisque des avertissements précéderont toute sanction. La loi du 12 juin précitée institue ainsi une obligation de surveillance de son installation à la charge de l’abonné à Internet, et prévoit un mécanisme très progressif permettant à la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI) de veiller au respect de cette obligation, en lui confiant le soin d’exercer, avant tout, un pouvoir de persuasion par l’envoi de recommandations successives. La loi du 28 octobre 2009 relative à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur Internet a complété ce dispositif en confiant au juge la possibilité de prononcer une sanction de suspension de l’accès à Internet à l’encontre des internautes préalablement avertis, au moins à deux reprises, par la commission de protection des droits de la Hadopi. Par ailleurs, la loi du 12 juin 2009 comporte diverses dispositions visant à favoriser l’attractivité et la richesse des offres proposées au public, qu’elles soient on non commerciales, notamment en prévoyant l’attribution par la Hadopi d’un label aux services d’offre légale qui le souhaitent et la mise en place d’un portail de référencement de ces mêmes offres, afin de renforcer leur visibilité et leur attractivité pour les internautes. Dans le prolongement de ces initiatives en faveur du développement de l’offre légale sur Internet, la mission « Création et Internet » a rendu, le 6 janvier 2010, son rapport sur l’offre légale de contenus culturels sur Internet et sur la rémunération des créateurs et le financement des industries culturelles. Les mesures préconisées par ce rapport ont pour objectif de permettre aux consommateurs, aussi bien qu’aux acteurs de la création, de tirer tous les bénéfices de ce nouveau cadre juridique, grâce au développement d’une offre légale attractive et de nouvelles sources de rémunération et de financement pour les artistes et les entreprises qui les soutiennent. En ce qui concerne la copie privée, le ministère de la culture et de la communication demeure attaché à ce qu’elle soit préservée dans les conditions fixées par la loi du 1er août 2006. Les mesures techniques mises en oeuvre et la protection juridique dont elles bénéficient ne doivent pas aboutir à réduire la copie privée à laquelle les consommateurs sont attachés. La Hadopi exercera pleinement les compétences anciennement dévolues à l’Autorité de régulation des mesures techniques, concernant l’appréciation de la conformité des mesures techniques avec l’exception de copie privée et la détermination du nombre minimal de copies privées autorisées en fonction des différents types de contenus, des différents modes d’exploitation et surtout de l’évolution technologique rapide des supports et systèmes de copie. À la suite de tensions apparues au sein de la commission au printemps 2008, qui se sont traduites par le refus de siéger des représentants des industriels et de certaines organisations de consommateurs, le secrétaire d’État au développement de l’économie numérique a été chargé par le Premier ministre de mener une mission de consultation et de réflexion, en vue de rétablir la confiance et la qualité du dialogue entre les différentes parties prenantes. Certaines des propositions de réforme issues de cette mission, conjointement proposées par la ministre de la culture et de la communication et le secrétaire d’État chargé du développement de l’économie numérique, ont été mises en oeuvre par le décret n° 2009-744 du 19 juin 2009. Ces réformes concernent les modalités de désignation du président de la commission, le renforcement de la majorité requise en cas de seconde délibération de la commission et les règles de présence des membres de la commission.
Question publiée au JO le : 14/08/2007 page : 5198
Réponse publiée au JO le : 03/08/2010 page : 8527
Date de changement d’attribution : 23/06/2009
Date de renouvellement : 15/04/2008
Date de renouvellement : 16/12/2008
Date de renouvellement : 28/04/2009
Date de renouvellement : 08/09/2009
Date de renouvellement : 06/04/2010
Réponse publiée au JO le : 03/08/2010 page : 8527
Date de changement d’attribution : 23/06/2009
Date de renouvellement : 15/04/2008
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Date de renouvellement : 28/04/2009
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Date de renouvellement : 06/04/2010
NB : C’est la première fois que je vois une question écrite attendre 3 ans sa réponse. Christine Albanel a tout fait pour ne pas répondre à cette question pourtant simple posée au début de la mandature. Il a fallu attendre son successeur, Frédéric Mitterrand, pour obtenir un avis du Gouvernement. Je suis effaré. Par ailleurs, pour aller plus loin, voir l’analyse de Numerama.