Les Français devraient au lendemain de la rentrée gouvernementale méditer cette maxime de Sénèque : ” Il n’est pas de vent favorable pour celui qui ne sait où il va.” Certes, comme à chaque changement de majorité, on a droit à l’incantation sur le redressement, c’est-à-dire sur la volonté de réparer les épouvantables conséquences des fautes de l’autre camp, mais quel est l’objectif ? Quand la France sera-t-elle debout, toute droite, si j’ose dire ? Dans un article du Monde du 11 Mai 2010, Nicolas BAVEREZ avait clairement défini le but à atteindre : échapper au cycle infernal de la dépense publique, des prélèvements obligatoires excessifs, des déficits et de l’endettement, et il avait tout aussi clairement souligné la faiblesse de notre pays, dont l’économie repose sur une consommation dopée par des transferts sociaux, donc par les déficits ! Le redressement devait donc passer par une véritable révolution, un ensemble de réformes structurelles destinées à baisser la dépense, à diminuer le coût du travail, à accroître la compétitivité, à relancer notre industrie et développer l’emploi marchand, créateur de richesses. Des exemples étrangers étaient cités : Canada, Australie, Suède… Le gouvernement précédent a plutôt visé cet objectif, trop mollement et trop tardivement, malheureusement.
Les annonces faites hier par le Premier Ministre révèlent, au contraire, une totale incohérence :
Veut-il relancer la consommation , au besoin par des mesures démagogiques, comme l’augmentation de 25% de l’allocation de rentrée scolaire ? Le voilà qui incite, paradoxalement, à l’épargne avec le relèvement des plafonds des livrets d’épargne, et qui évoque l’alourdissement de la CSG, lequel amputera à l’évidence le pouvoir d’achat ! Mais cette mesure, affirme-t-il, permettrait de baisser les charges qui pèsent sur le travail. Alors, pourquoi n’avoir pas maintenu et amplifié la TVA sociale qui poursuivait le même but, avec l’avantage de ne pas toucher aux revenus des Français, mais à la consommation, en favorisant les produits nationaux, avantagés par la baisse des charges par rapport aux importations subissant une TVA plus forte ? Cette orientation, comparable, dans une certaine mesure, à une dévaluation compétitive, visait à réduire le chômage par la seule voie réaliste : augmentation de la compétitivité et développement de l’emploi productif. Au lieu de cela, la gauche va une fois encore avoir recours à des emplois artificiels, qui loin de créer des richesses vont, au même titre que l’assistance accroître la dépense publique : les Emplois d’Avenir montrent l’inventivité sémantique des énarques de même que leur totale absence de créativité depuis les TUC des années 80 : le mot est souvent destiné à cacher la chose et ces “emplois d’avenir” appartiennent, en fait, au passé . Pour couronner cette terrible impression d’anachronisme et de rêves rétrogrades, ces momies politiques, à peine sorties des bandelettes de l’opposition, ignorant tout du monde dans lequel elles réapparaissent, proposent les solutions d’une économie dirigée, totalement impraticable aujourd’hui. Ni le blocage des prix de produits qui dépendent d’un marché mondial et de fluctuations monétaires que nous ne maîtrisons pas, ni les injonctions à se maintenir en France à des entreprises planétaires ne sont réalistes. Si ces velléités doivent en plus être soutenues par des charges supplémentaires ou des recettes fiscales moindres, cela devient absurde au regard de l’objectif de résorption des déficits et de la dette.
La politique économique et fiscale de Nicolas Sarkozy avait manqué son départ, puis elle s’était améliorée trop faiblement et trop tardivement, avec un grand emprunt étriqué et une TVA post mortem. On pouvait lui reprocher des gadgets, comme l’augmentation de 30% des droits à construire, mais il y avait, au moins, une conscience des problèmes et de leurs solutions. On est aujourd’hui passé des gadgets aux mesurettes contradictoires, de la lueur d’un jour naissant à l’obscurité d’une nuit revenue.